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NIGER - Retour sur l’année 2015-2016

NIGER - Retour sur l’année 2015-2016

20 décembre 2015 - par Auguste Kabore  , Chaibou Dan-Inna 
© Flickr - IFRI - image
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Auguste Kaboré

Chaibou Dan-Inna


POLITIQUE

Tout au long de l’année 2014, la vie politique au Niger a été dominée par la question du gouvernement d’union nationale qui a envenimé le climat politique avec des déclarations hostiles de part et d’autre et des procès entre ailes antagonistes du Mouvement National pour la Société de Développement (MNSD Nassara). Rappelons que l’idée d’un gouvernement d’union nationale a toujours été défendue par le président Issoufou Mahamadou. Déjà en 1999, au moment des élections présidentielles qui avaient vu l’avènement du président Tandja Mamadou au pouvoir, Issoufou Mahamadou, candidat du PNDS Tarayya, avait défendu la thèse d’un gouvernement d’union nationale, car sa conviction profonde est que nos États sont en transition démocratique et qu’ils n’ont pas besoin d’antagonisme permanent entre les forces politiques. Pour lui, au lendemain de chaque élection, les forces politiques devraient se mettre ensemble et participer à l’œuvre commune de construction nationale sur la base de quelques objectifs sur lesquels tous les partis sont d’accord comme l’unité nationale, les questions de sécurité, etc.

Le président Issoufou Mahamadou ( Capture d’écran vidéo RFI)

Après son élection à la magistrature suprême en avril 2011, Issoufou Mahamadou, s’attèlera à la concrétisation de cette idée. Mais ce n’est qu’en août 2013, au lendemain du discours du chef de l’État à l’occasion de la célébration de l’anniversaire de l’Indépendance que le principal parti de l’opposition, le MNSD Nassara, en acceptera le principe après de longues discussions où les deux partis ont confronté leurs programmes afin de les harmoniser et de les inscrire dans la perspective d’une action commune pour le bien-être des Nigériens. Malheureusement au moment de la mise en œuvre de l’accord et de la formation du nouveau gouvernement, de nouvelles difficultés vont surgir au sein du principal parti de l’opposition : une aile, dirigée par le Secrétaire général acceptera d’entrer dans le gouvernement alors que l’autre, avec à sa tête le président du parti, Seyni Oumarou, se rétracte et réaffirme son appartenance à l’opposition.
Commencée en août 2013, avec la volonté affichée du président Issoufou de former un gouvernement d’union nationale associant toutes les forces politiques du pays, la crise politique née de la division des partis politiques sur cette question s’est accentuée tout au long de l’année avec pour point d’orgue la convocation d’un congrès extraordinaire du principal parti de l’opposition, le MNSD Nassara le 29 novembre 2014.

Mais ce congrès extraordinaire qui devait consacrer la légitimation d’une des ailes ne fera qu’aggraver les dissensions. En effet, le 29 novembre 2014 chacune des deux ailes du MNSD Nassara organise son propre congrès : le Secrétaire général du parti, Albadé Abouba, le tient au Palais du 29 juillet tandis que Seyni Oumarou, le président du parti, se retrouve avec ses partisans dans la banlieue de Niamey. Aujourd’hui encore, après maints recours judiciaires, l’affaire n’a pas trouvé de dénouement et ne sera certainement pas terminée au moment de la désignation des candidats à la prochaine élection présidentielle. Il faudra donc s’attendre à un véritable imbroglio juridique et à d’inévitables contestations dans le cadre des élections de 2016.
La vie politique nationale a aussi été marquée par les dissensions au sein de la majorité présidentielle. En effet, le partenaire principal du Parti Nigérien pour la Démocratie et le Socialisme (Pnds-Tarayya) au moment de l’élection présidentielle de 2011, le Moden-Lumana du président de l’Assemblée nationale, Hama Amadou, finira par rejoindre les rangs de l’opposition et mènera tout au long du premier semestre 2014, une guerre de tranchées pour mettre la majorité présidentielle en difficulté.

Dosso-Sogha et la célébration du 18 décembre 2014
Le 17 décembre 2013, à l’occasion du traditionnel message à la Nation pour la Fête de la République, le président Issoufou Mahamadou avait fait part à ses concitoyens de sa volonté de donner un nouveau visage à toutes les grandes villes du Niger. La rénovation de la capitale Niamey avait déjà commencé avec le Programme Niamey-Nyala, « Niamey-la coquette » et l’inauguration du premier échangeur de la ville de Niamey, la réfection des routes et la construction d’hôtels de grand standing.
L’ambition du président Issoufou dans le cadre de la reconstruction du Niger a certes pour épicentre la ville de Niamey, mais elle vise plus largement à transformer toutes les villes en centres urbains où il fait bon vivre. De manière tournante chaque anniversaire de la proclamation de la République sera l’occasion d’ouvrir un chantier de rénovation et l’embellissement des grandes agglomérations.

Le projet de Dosso-Sogha « Dosso-la belle », projet ambitieux et gigantesque, témoigne de la détermination des autorités de la troisième République de rendre coquettes les capitales régionales du pays en les érigeant à la pointe de la modernité et en augmentant leur capacité d’accueil. Avec ce projet, la ville de Dosso sera dotée de constructions flambant neuves, offrant de nouvelles perspectives à la Cité des Djermakoye, désormais susceptible de pallier la saturation des services publics de Niamey.
Avec la célébration, le 18 décembre 2014, du 57e anniversaire de la Proclamation de la République, Dosso est « une ville transformée sur tous les plans » dira le journal le Sahel. On y enregistre ainsi au plan culturel et sportif, la rénovation de la Maison des Jeunes, de l’Arène de lutte traditionnelle, de l’Hippodrome, du Stade de Football. De même, le Centre Hospitalier Régional et bien d’autres infrastructures sanitaires ont été rénovés. Outre la Case de passage présidentielle, le Gouvernorat et la Résidence du Gouverneur qui ont été reconstruits, Dosso-Sogha a permis aussi le bitumage des routes, la reprise de l’éclairage public, la réalisation de la Cité du 18 décembre et de plusieurs camps militaires destinés aux forces de défense et de sécurité.
C’est en tout plus de 40 milliards qui ont été investis dans ce projet pour donner à Dosso fière allure et en faire une capitale régionale digne de ce nom. C’était pour le budget national un lourd sacrifice à l’heure où des dépenses nouvelles s’imposaient au pays avec l’envoi de troupes nigériennes au Mali dans le cadre de la Minusma (Mission des Nations Unies au Mali)


Niamey au crépuscule (Flickr - gustave deghilage)

Guerre au Mali et libération des otages français
Depuis le début de la guerre au nord du Mali, déclenchée par la Coordination des Mouvements de l’Azawad (CMA) regroupée autour du Mouvement National de Libération de l’Azawad (MNLA), le président Issoufou Mahamadou a été l’un des rares chefs d’État à appeler la communauté internationale à prendre des mesures afin d’éviter une éventuelle « somalisation du Mali ». Après la libération du Mali des djihadistes grâce à l’intervention des forces armées françaises, tchadiennes et nigériennes, le président Issoufou va s’atteler à la libération des otages français dont certains avaient été kidnappés dans la nuit du 15 au 16 octobre 2010 à Arlit. C’est ainsi qu’après la libération des otages Thierry Dol, Daniel Laribe, Pierre Legrand et Marc Feret le 20 octobre 2013, le dernier otage français au Sahel, Serge Lazarevic sera libéré à son tour le 9 décembre 2014. C’est l’aboutissement d’un long processus et la résultante de négociations de longue haleine qui ont permis de mesurer les capacités de la diplomatie nigérienne dans la résolution des problèmes de la sous-région.

Participation du Niger au Sommet de l’Union africaine
Le 26 juin 2014, le chef de l’État nigérien a assisté à la 2e session ordinaire de la Conférence des chefs d’État et de Gouvernements de l’Union africaine dont le thème était axé sur l’autosuffisance alimentaire. L’engagement y a été pris de faire appel au leadership du président Issoufou pour qu’il mobilise ses pairs afin que les gouvernements africains allouent 10% de leurs budgets respectifs à l’agriculture en vue de l’augmentation de la productivité de l’agriculture familiale tout en réduisant les importations. Il faut dire que Niger sous l’impulsion du président Issoufou a engagé des réformes majeures dans ce domaine avec l’Initiative 3N, « Les Nigériens nourrissent les Nigériens ».
Le 16 février 2015, cinq chefs d’État du Sahel, dont le président Issoufou se sont réunis à Nouakchott en Mauritanie, afin de prendre les mesures que nécessite la lutte contre l’insécurité dans la sous-région. C’est ainsi que fut créé le G5 Sahel regroupant le Burkina Faso, le Mali, la Mauritanie, le Niger et le Tchad avec pour siège Nouakchott et pour Secrétaire exécutif le Nigérien Mohamed Elhadj Najoum.
La vie diplomatique du Niger de juin 2014 à juin 2015 a été aussi marquée par de nombreuses visites d’importantes personnalités : François Hollande, Manuel Valls, le président de l’Union européenne, les chefs d’État du Nigéria, du Tchad, de Guinée Équatoriale et les visites d’État du président Issoufou en Algérie, en Arabie Saoudite et au Japon.


Le grand marché de Niamey (Flickr - gustave deghilage)

ÉCONOMIE et DÉVELOPPEMENT
Sur le plan économique, le Niger a reçu l’appui financier de différents partenaires. Ainsi, le Niger a reçu de l’UE (Union européenne) une aide de 41,25 millions d’euros (plus de 20 milliards de FCFA). Cette aide entre dans le cadre du Programme d’appui budgétaire appelé « Contrat Bonne Gouvernance et Développement ». Elle fait suite à un autre financement relatif au « Programme spécifique d’appui à la sécurité alimentaire ». C’est surtout la réponse à une requête que le gouvernement avait adressée à l’UE pour pallier le déficit céréalier que connaît le pays. Ces appuis s’intègrent dans le cadre global du PDES (Programme de Développement Économique et Social).
La Banque Mondiale a, elle, signé plusieurs accords de financement avec le Niger. Elle a tenu une rencontre d’évaluation du CPS (Cadre Stratégique Niger-Banque Mondiale). Deux objectifs étaient visés : d’une part, faire le point de l’État de la mise en œuvre du cadre et tirer les leçons en vue d’améliorer la phase restante ; d’autre part, identifier les changements intervenus depuis le début du programme et proposer les orientations idoines. Il faut noter que le financement de ce CPS s’élève à 800 millions de dollars US (400 milliards de FCFA). D’où un montant cumulé de plus d’un milliard cent millions de dollars US d’investissements pour la Banque Mondiale au Niger. Ces investissements pour les secteurs prioritaires tels que la gouvernance, l’éducation, la santé, l’eau et l’assainissement, l’énergie et les mines, le développement rural et urbain, etc.
Autre accord de financement signé avec le Niger par la Banque Mondiale, celui portant sur le « Projet pour l’autonomisation des femmes et le dividende démographique au Sahel ». D’un montant de 53,5 millions de dollars US, ce financement intervient pour la santé reproductive des femmes et l’éducation des filles. À cet accord s’ajoute l’accord de financement additionnel du PRODEX (Projet de Développement des Exportations des Marchés Agro-pastoraux). Ce financement d’un montant de 13,8 millions de dollars (6,9 milliards de FCFA) vise notamment à couvrir un plus grand nombre de PME (Petites et Moyennes Entreprises) dans l’agriculture et l’élevage. En effet il va contribuer à la réalisation de plus d’environ 400 nouveaux sous-projets et d’une cinquantaine de PME au profit de près de 20 000 personnes. Cette somme complète 400 millions de dollars (20 milliards de FCFA) que la Banque Mondiale a déjà accordés au PRODEX. Ces fonds sont en parfaite adéquation avec les priorités du gouvernement dans le PDES.

Le rapport conjoint (BAD, OCDE, PNUD) « Perspective économique en Afrique » 2014-2015 lui annonce des perspectives encourageantes pour le Niger. Ce rapport note une croissance de 6 % dans la production de la raffinerie de Zinder, et de 6,2 % pour l’uranium et l’or. Il précise cependant que des déficits restent à relever dans le secteur privé. Des efforts doivent donc être faits pour l’amélioration du climat des affaires dans ce pays.

Le transport ferroviaire à l’honneur
Lancement le 7 avril 2014 des travaux de construction de la voie ferroviaire Parakou-Dosso-Niamey suivis le 19 mars 2015 de ceux de réhabilitation de la ligne de chemin de fer Cotonou-Parakou. Il s’agit là de la concrétisation d’un vieux rêve nourri depuis 80 ans par les Nigériens dont le pays était resté le seul de la sous-région ouest-africaine les lignes de chemin de fer devant y parvenir étant restées respectivement pour la ligne Dakar-Niger à Bamako, pour la ligne Abidjan-Niger à Bobo-Dioulasso et pour Cotonou-Niamey à Parakou. Ce projet d’un coût de plus d’un milliard d’euros pour une longueur de 574 km s’inscrit dans un cadre plus vaste, celui de la Boucle ferroviaire en Afrique de l’Ouest, reliant Cotonou à Abidjan en passant par Parakou, Dosso, Niamey et Ouagadougou.
À l’instar de la ligne de chemin de fer qui sera réalisée en PPP (partenariat public privé) par le Groupe Bolloré Logistics, la société américaine Source California Energy Services a conclu avec le gouvernement nigérien la construction à Salkadamma d’une centrale thermique à charbon de 600 mégawatts pour un montant de plus 740 milliards de francs CFA. Le lancement des travaux de construction de cette centrale a eu lieu le 25 juin 2014 par le président Issoufou Mahamadou à Salkadamma.


Loin du coeur de Niamey (Flickr - gustave deghilage)

SOCIÉTÉ

Le Niger a encore été frappé par une épidémie de méningite cette année. Cette épidémie a causé entre janvier 2015 et mai 2015,256 décès sur 3 656 cas recensés. Cette situation a occasionné la suspension des cours pendant une semaine dans les lycées et collèges de Niamey.

L’affaire dite du trafic des bébés a encore alimenté l’actualité. En rappel, il s’agit d’un trafic de bébés entre le Nigéria et le Niger qui, 2014, a mis en cause certaines personnalités de l’État parmi lesquelles Hama Amadou le président de l’Assemblée nationale, Hadiza sa 2e épouse, Abdou Lobo le ministre de l’Agriculture, et Moussa Haitou, le directeur général de la Sonibank. Cela a amené Hama Amadou à fuir le pays, laissant ainsi vacant le poste de président de l’Assemblée nationale. Depuis lors un mandat d’arrêt a été lancé contre lui par la justice nigérienne pour les chefs d’accusation suivants : complicité de supposition d’enfants, faux et usage de faux, déclarations mensongères. Celui-ci considère ces poursuites comme une machination politique visant à empêcher sa candidature aux prochaines élections présidentielles. Le tribunal correctionnel à qui le dossier avait été confié s’est dit incompétent pour le juger, car n’étant pas habilité à se prononcer sur les questions de filiation. L’affaire a été renvoyée à la Cour d’appel.

Le secteur des mines n’a pas été épargné par les mouvements sociaux. Le SYNAMIN (Syndicat regroupant les travailleurs des mines) a manifesté son mécontentement face au « licenciement déguisé »pratiqué par la direction d’exploitation de la Somaïr (Société minière de l’Aïr). Ce syndicat reproche à la direction d’avoir supprimé plus de 400 emplois chez les sous-traitants locaux et engendré la fermeture d’une dizaine d’entreprises locales. En effet 52 employés de la société Synodro d’Immouraren ont été licenciés à cause de l’arrêt des activités. Le site d’uranium d’Imouraren (de la société Areva) n’a pas été épargné. Environ 180 employés y ont été mis au chômage. La raison serait, selon Areva, la baisse du cours de l’uranium qui est passé de 135 dollars à 40 dollars.


Des camps de réfugiés qui fuient devant Boko Haram (Flickr - Commission européenne)

SÉCURITÉ

Charlie Heddo
En réaction à la publication d’une caricature du Prophète Mohamed dans Charlie Hebdo (journal satirique français) en janvier 2015 des émeutes se sont déroulées au Niger ont fait 5 morts. Ces manifestations violentes ont été marquées par la destruction d’une vingtaine d’églises, de bars, de restaurants et d’hôtels. À Zinder des manifestants ont brûlé un drapeau français et saccagé la bibliothèque du Centre culturel français. Cette situation a amené le président Mahamadou Issoufou à s’adresser encore à la nation pour lancer un appel au calme à la population. Il a condamné ces violences en rappelant que de tels actes ne sont pas cautionnés en Islam. À cette occasion il s’est également expliqué sur sa participation à la marche de Paris lors des attaques contre Charlie Hebdo.
Il a déclaré partager l’indignation suscitée par cette publication, mais a précisé que la liberté d’expression « ne saurait signifier la liberté d’insulter ce que les autres ont de plus cher ». Ces manifestations ont également été condamnées par Laurent Fabius, le ministre français des Affaires étrangères. Celui-ci a, à travers un communiqué, exprimé sa solidarité avec les autorités nigériennes.
Selon certaines Organisations de la Société Civile (OSC) ces manifestations ne sont pas liées à « l’affaire Charlie Hebdo ». C’est plutôt l’expression d’un malaise sociale. C’est le cas du Réseau des Organisations pour la Transparence et l’Analyse Budgétaire (ROTAB) pour qui « il ne s’agit pas d’une guerre de religion, mais plutôt d’une crise sociale  ». Ces organisations invitent donc les autorités nigériennes à prendre leurs responsabilités.

Boko Haram
Ces événements tragiques de Zinder et de Niamey ont précédé de peu ceux qui ont concerné la région de Diffa où dans la nuit du 6 février 2015, la secte Boko Haram mena pour la première fois une attaque meurtrière dans les villes de Bosso et Diffa dans le sud-est du pays, à la frontière avec le Nigéria.
On se souvient que la secte nigériane, muée en groupe terroriste, menait depuis déjà quelques années de nombreuses exactions et massacres sur les populations civiles du Nord-Est du Nigéria, semant partout la désolation et la mort, brûlant des villages entiers et prenant des femmes et de jeunes collégiennes en otages. Ces crimes insoutenables ont fait affluer vers le Niger des milliers de réfugiés et des camps ont été créés avec l’aide de plusieurs organismes internationaux pour porter aide et assistance aux réfugiés.
Des mesures préventives de sécurité ont aussi été prises par les autorités nigériennes pour contrecarrer d’éventuelles infiltrations ou incursions des éléments de Boko Haram. Il s’agit du déploiement depuis le mois de juin 2014 de renforts militaires chargés de patrouiller tout le long de la frontière et dans les communes de la région de Diffa. Cependant, malgré toutes les dispositions prises, Bosso et Diffa seront attaquées dans la nuit du 6 février 2015 par des hordes de plusieurs centaines de jeunes gens de la secte. L’armée nigérienne appuyée par les forces armées tchadiennes parviendra à repousser l’attaque, mais le bilan de cette première incursion de Boko Haram en territoire nigérien reste lourd:109 terroristes sont tués et les forces nigériennes enregistrent quatre morts, 17 blessés et 2 disparus.

Ces premières attaques de Boko Haram ont failli créer une véritable psychose au sein des populations et le gouvernement réagit avec promptitude et détermination. Dès le 9 février 2015, l’Assemblée nationale adopta à l’unanimité une résolution autorisant le gouvernement à envoyer des troupes au Nigéria. Le 10 février le conseil des ministres décréta l’état d’urgence pour une durée de 15 jours renouvelables dans la région de Diffa. Le 16 février 2015, des manifestations d’une ampleur inégalée furent organisées à Niamey et dans les villes de province en soutien aux forces armées et aux populations de Diffa. Un téléthon qui permit de recueillir près de 2 milliards de francs CFA fut aussi organisé par des médias et la Fondation Tatali Iyali de la première Dame Malika Issoufou en vue de venir en aide aux familles des soldats blessés ou décédés.

Toute l’année 2014, le gouvernement s’est engagé dans une politique active de mobilisation de la communauté internationale et des chefs d’État de la sous-région afin d’éradiquer les menées subversives de Boko Haram.
La détermination des autorités nigériennes et les mesures énergiques prises à cet effet pour éradiquer Boko Haram ont permis de ramener la sérénité, la tranquillité dans la région de Diffa où les activités ont repris leur cours normal même si des attaques sporadiques du groupe terroriste à l’instar de celle de l’île de Karamga le 25 avril et des villages de Lamana et Ngoumao dans la nuit du 17 au 18 juin restent toujours possibles. Mais il est désormais sûr que la détermination des gouvernements de la sous-région, surtout avec l’élection du nouveau président du Nigéria, Muhammadu Buhari permettra de vaincre Boko Haram et de mettre fin à ses menées criminelles. Il faut souligner à cet effet qu’un centre de commandement opérationnel a été créé entre le Nigéria, le Niger, le Cameroun et le Tchad pour coordonner la lutte contre Boko Haram.

Le survol des événements qui ont eu cours au Niger de juin 2014 à juin 2015, montre même s’il reste assez partiel une vie politique et économique intense.au plan politique, elle le sera davantage en 2015- 2016 avec les élections présidentielles et législatives qui auront dans le courant du premier trimestre 2016. Déjà les invectives ont commencé entre camps politiques avec la mise en place de la Commission Électorale Nationale Indépendante (Ceni) et la première mouture du calendrier des élections. Gageons cependant que tout se passera pour le mieux, car le Niger a aujourd’hui une longue tradition d’élections transparentes et crédibles.

Boko Haram et la politique intérieure du Niger
Boko Haram (devenu groupe État islamique en Afrique de l’Ouest), l’organisation islamiste armée du Nigeria a effectué une attaque le samedi 25 avril 2015 contre une section de l’armée nigérienne installée à Karamga sur le Lac Tchad. Cette attaque s’est soldée par 74 morts, dont 46 soldats, 28 civils, auxquels s’ajoute une trentaine de disparus. Elle a fait plus d’une centaine de tués dans les rangs des attaquants. Il faut noter que Karamga est une île située à Bosso, ville de l’extrême Est du Niger.
Face à l’expansion des attaques terroristes dans la sous-région (Afrique de l’Ouest) une force mixte, multinationale a été mise en place par les chefs d’État. Cette force a engagé une guerre contre ce phénomène notamment dans le bassin du Lac Tchad situé entre le Cameroun, le Niger, le Nigeria et le Tchad. Le groupe Boko Haram y opère régulière des attaques meurtrières. Le Niger y participe depuis février 2015 avec quelques centaines de soldats. Le président nigérien Mahamadou Issoufou s’est montré très déterminé dans cette offensive. Pour lui, Boko Haram est devenu un monstre ; et il n’a aucun avenir dans la sous-région. Il faut donc s’organiser pour arrêter cette menace. Pour cela il invite les Nigériens à s’y impliquer.


Préparation d’une mission des troupes françaises, tchadiennes et nigériennes (Armée de terre - Fr)

Cette détermination lui a valu une visite de soutien des présidents Faure Gnassimbe du Togo et Boni Yayi du Bénin. « Nous sommes tous agressés » ont – il déclaré. Ces propos ont été appuyés par, le président Issoufou en ces termes : « Nous sommes déterminés à éradiquer Boko Haram dans la sous-région. Boko Haram sera vaincu […]. Je n’ai aucun doute. »
Dans le même sens, Manuel Valls, le Premier ministre français, a aussi effectué une visite de soutien aux autorités des pays engagées dans cette lutte dans la région sahélienne. Cette visite a été marquée par une visite sur le terrain pour observer le dispositif de l’Opération Barkhane (force française chargée d’appuyer la lutte antiterroriste dans les pays sahéliens) et d’encourager les troupes qui agissent essentiellement dans des zones très sensibles.
Les éléments du 23e bataillon interarmes d’Akakoa (Niger) ont, au cours d’une patrouille, affronté un groupe de trafiquants d’armes et de drogue lourdement armés dans le massif de l’Aïr. Appuyé par la force française de l’Opération Barkhane ces soldats ont, après de très durs combats, saisi 2,8 tonnes de drogue et une importante quantité d’armes et de munitions. L’Opération Barkhane a également effectué une descente dans la « passe de Salvador » passage de trafiquants transitant par le nord du Niger. Cette mission a permis de détruire des caches de carburants, de munitions et nourriture de terroristes dans le désert.

La terreur causée par Boko Haram a entraîné la fuite et l’évacuation de plusieurs milliers de personnes vivant dans la partie nigérienne du lac Tchad. Ces réfugiés ont été transférés dans les villes de N’Guimi et de Bosso. Ils ont reçu la visite des autorités nigériennes, dont le Premier ministre Brigi Rafini. Celui-ci a déploré les mauvaises conditions d’accueil et de vie des réfugiés. Il s’est dit indigné, « choqué et écœuré » par ce qu’il a vu.

Des maçons à Niamey (Flickr - gustave deghilage)

CULTURE

L’année 2014 a été celle de l’inscription, sur proposition du Niger, de la parenté à plaisanterie au patrimoine immatériel de l’humanité que le pays célèbre chaque année. Le cousinage à plaisanterie est une pratique ancienne au Niger ancrée depuis des temps immémoriaux dans les habitudes de plusieurs groupes sociaux, ethnies et familles particulièrement en Afrique de l’Ouest. Elle crée des relations particulières entre cousins germains provenant d’un frère et d’une sœur, entre ethnies, entre groupes sociaux professionnels. C’est une relation de jeu, fondée sur la taquinerie et la plaisanterie, ne devant jamais déboucher sur une querelle ou un conflit.

L’État moderne a vite compris l’efficacité de la parenté à plaisanterie comme moyen de résorption des conflits, comme facteur de paix sociale par le renforcement des sentiments de fraternité entre les communautés habitant à l’intérieur des mêmes frontières. C’est ainsi que le Niger a créé depuis bientôt une décennie, en 2007 précisément, une Semaine de la parenté à plaisanterie portée depuis 2010 à une durée d’un mois dans le souci d’élargir les objectifs visés par cette activité culturelle. La sixième édition de cette fête s’est déroulée à Dosso et une caravane artistique a été lancée dans les huit régions du pays afin de sensibiliser les jeunes sur les vertus du cousinage à plaisanterie. Le 28 novembre 2014, le Niger a obtenu l’inscription du cousinage à plaisanterie sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l’humanité par la 9e session du Comité intergouvernemental de l’UNESCO pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel de l’Humanité.



SPORT

Deux événements majeurs ont marqué l’année 2014 : la Coupe d’Afrique des Nations CAN U17 et le 36e championnat de lutte traditionnelle. Concernant la Coupe d’Afrique des Nations des moins de 17 ans, le Niger n’avait pas eu l’occasion de l’accueillir depuis sa création en 1995. En 2015, l’honneur lui est donc revenu de l’abriter du 15 février au 1er mars 2015. Huit nations y étaient engagées en plus du pays organisateur : la Côte d’Ivoire, le Nigéria, la Guinée, la Zambie, le Mali, le Cameroun et l’Afrique du Sud. La coupe a été remportée par l’équipe malienne face à la formation sud-africaine sur un score de 2 buts à zéro. À l’issue du match de classement, la Guinée a obtenu la troisième place face au Nigéria par trois buts à un.

Le Championnat de lutte traditionnelle s’est tenu, quant à lui, du 14 au 22 mars 2015 à Agadez. On se souviendra que ce championnat avait été institué en 1975 lorsque Seyni Kountché était au pouvoir. Il est organisé chaque année dans l’une des huit capitales régionales. Après Diffa en 2014, c’est Agadez qui a accueilli le 36e championnat de lutte traditionnelle. Dix lutteurs par région, soit quatre-vingts pour l’ensemble de la compétition, ont eu à concourir pour l’obtention du Sabre national. Sur les quatre-vingts lutteurs c’est Issaka Issaka de Dosso qui s’est imposé face en finale à Sabo Abdoulaye de Niamey. Le nouveau roi des arènes nigériennes a reçu en récompense de ses exploits10 millions de FCFA des autorités nigériennes et deux autres millions du Conseil de l’Entente en plus des nombreux cadeaux des particuliers. Grâce à lui, la région de Dosso remporte pour la troisième fois en quarante années le trophée de la lutte traditionnelle, l’un des sports les plus populaires au Niger.

Auguste Kabore
Université de Ouagadougou - BF
kab_augustus@yahoo.fr
theodore.kabore@iniv-ouaga.bf
Chaibou Dan-Inna
Université Abdou Moumouni, Niger
dchaibou@yahoo.fr

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