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BURKINA FASO - « On observe une irrégularité de la distribution de la pluviométrie », Dr Josias Sanou

BURKINA FASO - « On observe une irrégularité de la distribution de la pluviométrie », Dr Josias Sanou

30 juin 2022 - par Alice Thiombiano 
Agroforesterie au Burkina Faso - © Transjardins
Agroforesterie au Burkina Faso
© Transjardins

Les changements climatiques, un problème auquel font face beaucoup de pays. Ce problème n’épargne aucune population qui d’ailleurs est le premier responsable de cette situation. Au Burkina Faso, ce même problème est devenu très sérieux depuis un certain. Des chercheurs burkinabè étudient les causes au niveau local et proposent des moyens d’adaptation et de lutte contre ces changements.

Dr Sanou Josias, Chercheur de l’INERA département environnement et forêt, spécialité écophysiologie l’agroforesterie de l’INERA

Changement climatique, le sujet qui fait couler beaucoup d’encre et de salive, se définit comme tout changement de facteurs météorologiques sur une longue période, directement ou indirectement lié à l’activité humaine. Ce changement « altère la composition de l’atmosphère qui vient s’ajouter à une variabilité naturelle du climat, qui est observée au cours des années précédentes  », selon Dr Josias Sanou, Chercheur à l’Institut de l’Environnement et de Recherches Agricoles du Burkina Faso (INERA), au Département Environnement et Forêt avec pour spécialité écophysiologie l’agroforesterie.

En d’autres termes, le chercheur note que sur le cas de la température, depuis une dizaine d’années, celle qui est observée actuellement est supérieure à celle d’avant. Les changements climatiques font l’objet de beaucoup de recherches parce qu’ils ont des conséquences sur les populations et l’une d’elles, c’est le réchauffement qui entraine l’installation de vagues de canicules et le dérèglement climatique surtout au niveau de la pluviométrie. On note ainsi des régions plus sèches et des régions plus humides avec beaucoup d’inondations et des tempêtes violentes. Il y a plusieurs conséquences qui sont observées actuellement au Burkina Faso, selon le chercheur de l’INERA au Centre National de la Recherche Scientifique et Technologique (CNRST).

« Si on prend l’augmentation de la température, la population la ressent, donc aux périodes chaudes, la vie est encore plus difficile pour ceux qui n’ont pas les moyens d’y faire face. Il y a l’irrégularité des pluies qui fait qu’il y a une incertitude au niveau de la production, que ce soit agricole ou élevage », explique-t-il. Les changements climatiques ont toujours été vus d’un mauvais œil. Alors qu’ils sont des avantages pour certains endroits. Dans les pays occidentaux, les changements climatiques ont des avantages. Mais de façon globale, au niveau du globe, on ne peut pas parler d’avantages selon Dr Sanou, par contre de façon localisée, dans certaines zones, on peut avoir des atouts. L’un des principaux facteurs dans les changements climatiques est le réchauffement climatique, à en croire le spécialiste.

« Dans les pays qui sont du côté de l’Arctique où il y a la glace qui recouvre le sol, ils assistent actuellement à la fonte de la glace et la mer, et l’océan Arctique, à ce niveau va permettre la navigation maritime. On peut dire que c’est un avantage. Ça va rapprocher la Russie des États-Unis, le Japon de la Russie. Aussi, dans certaines zones où les températures étaient très basses et que le réchauffement arrive, on pourra assister à la production de certaines cultures qu’ils ne pouvaient pas y être produites », note Dr Sanou qui précise qu’il s’agit des avantages localisés qui sont minimes lorsqu’on regarde le phénomène à grande échelle.

Pour le cas du Burkina Faso, ces avantages sont légèrement localisés. Il est possible d’avoir des pluies dans des zones où la pluviométrie était faible. Mais de l’autre côté, il y a des zones où les populations vont assister à plus de sècheresse. « On ne peut pas dire qu’il y en a actuellement, mais on assiste à une légère augmentation de la pluviométrie. De façon générale au Burkina, on observe plutôt à une irrégularité de la distribution de la pluviométrie, ce qui fait qu’il y a des périodes où il pleut beaucoup et des périodes où on assiste à des poches de sécheresse », précise—t-il.

Les changements aussi bien avec ses conséquences que ses avantages ont plusieurs causes. La principale cause concerne les activités humaines, c’est-à-dire l’émission des gaz à effet de serre notamment le gaz carbonique. Il s’est accru avec l’industrialisation et l’augmentation des moyens de déplacement utilisant les carburants. Au-delà de cette raison, les causes naturelles, dont l’émission des éruptions volcaniques, contribuent aussi aux changements climatiques.
Au Burkina, l’émission du gaz à effet de serre reste la principale cause. « On va pointer la déforestation puisque notre niveau d’émission de gaz à effet de serre n’est pas au niveau des pays développés. C’est surtout dû à la vulnérabilité des populations. Elles ont tendance à se replier sur les végétaux qui sont là et l’exploitation de ces végétaux réduit la capacité à absorber le gaz carbonique  », affirme Dr Sanou.

La principale cause des changements climatiques est l’émission de gaz à effet de serre. Mais qui sont les gaz à effet de serre ? Il s’agit des gaz tels que le gaz carbonique, le gaz utilisé dans l’industrie, le méthane. Le butane qui est naturel peut dégager des compositions de la matière organique.

« De façon naturelle, lorsqu’on coupe un arbre, l’arbre rejette le gaz carbonique et le méthane en fonction de la manière dont l’arbre a été coupé. Dans le cycle normal, ce gaz doit être absorbé par d’autres végétaux, mais, en augmentant la quantité de ces gaz dans l’atmosphère, elle forme une couverture au-dessus de la terre et lorsque les rayons du soleil arrivent au sol, normalement ils sont absorbés par le sol, mais une partie sera réémise sous forme de rayonnement infrarouge. C’est ce rayonnement infrarouge que bloquent ces gaz. Ils empêchent ce rayonnement de quitter notre atmosphère. Ce qui provoque un réchauffement au niveau de notre terre  », détaille le chercheur qui précise que s’il n’existait pas d’atmosphère sur « notre terre, par exemple, on estime que la température serait de -15 degrés »

Au-delà des conséquences sur l’environnement, les changements climatiques ont un impact sur l’économie. Au niveau mondial, son impact est estimé par un groupe d’experts, selon Dr Sanou, qui trouve que si l’augmentation de la température atteint 4 degrés, cela pourrait se répercuter par une baisse au niveau mondial du produit intérieur brut l’ordre de 1,5 %.
Cet impact, au niveau du Burkina Faso, a été également étudié par des chercheurs qui ont fait des scenaris. « Lorsqu’on estime que l’augmentation de la température sera légère. Environ jusqu’à 1,7 degré par exemple d’augmentation, ils estiment que le PIB pourra être diminué de 2,4 %, mais, lorsque cette augmentation est haute de 2 à 5 degrés, la diminution du PIB pourrait atteindre 15, 6 % », annonce le chercheur au CNRST.
Aussi bien sur l’économie, les changements climatiques ont un impact sur l’agriculture, l’élevage et la pèche. L’impact du changement climatique sur l’agriculture se présente sous la forme d’inondations, des poches de sécheresse, de débuts et de fin saisons perturbés. La non-maitrise de ces éléments entraine la baisse de la production agricole.

Selon Dr Josias Sanou, concernant l’élevage, lorsqu’il y a un scénario de sécheresse, il y aura manque de fourrage, ce qui veut dire que la biomasse ne peut pas bien se développer et pendant la saison sèche, les animaux n’auront pas de fourrage, ce qui va jouer aussi sur les rendements à ce niveau.
Pour ce qui concerne la pèche, l’élévation de la température au niveau des écosystèmes, des mares, des rivières, des fleuves peuvent amener certaines espèces de poisson à se déplacer, migrer ailleurs, pour trouver des conditions plus favorables.
Le Burkina Faso, depuis les années 2000, a pris le problème des changements climatiques à bras le corps en signant plusieurs conventions internationales comme la convention-cadre des Nations-Unies sur les changements climatiques. Au niveau sous régional, au niveau de la CEDEAO, il y a plusieurs politiques sur l’environnement que le Burkina a adopté. Ces politiques se traduisent sur le plan national à travers l’adoption et la mise en œuvre de plusieurs cadres, instruments et outils tels que le Document d’Orientation Stratégique (DOS) pour une croissance durable des secteurs de l’agriculture et de l’élevage, le Programme National d’Aménagement des Forêts (PNAF) et le Plan d’Actions sur les Changements climatiques.

Le pays a également adopté et publié en 2015, un plan d’adaptation aux changements climatiques. Par rapport à ce plan, il y a plusieurs projets allant dans le sens de l’adaptation aux changements climatiques qui ont été lancés. La rénovation ou la construction de bâtiments mieux adaptés aux conditions climatiques extrêmes, la construction de murs et de digues contre les inondations et le choix de cultures plus résistantes à la sécheresse. Outre ces projets d’adaptation, il existe des initiatives pour l’atténuation. Il s’agit notamment de la réduction des gaz à effet de serre par la promotion des énergies renouvelables.

En vue de permettre aux agriculteurs de bien produire malgré ces changements climatiques, il a été mis en place les prévisions météorologiques avec conseils. «  Avant la campagne, on va faire des prévisions qu’on va partager avec les producteurs pour les situer sur le début de la saison, comment va évoluer la pluviométrie jusqu’à une fin probable de la saison, des prévisions par jour », confie le chercheur.

Au niveau du CNRST, plusieurs projets sur les changements climatiques existent. Pour les producteurs, il est développé des villages climato-intelligent, c’est-à-dire que dans le village, toutes les activités seront menées en tenant compte du changement climatique. « Dès le départ, on essaie de faire un état des lieux. Qu’est-ce qui a changé au niveau du climat, quelles sont les conséquences qu’il y a actuellement et pour chaque conséquence, on essaie de mettre au point un paquet technologique qui permet d’atténuer les effets de ce changement et aussi qui permet aux populations de s’adapter, c’est-à-dire pouvoir produire et vivre avec ce changement », témoigne-t-il.

Dr Noufou Ouédraogo

Au niveau de l’Institut de l’Environnement et de Recherches Agricoles du Burkina Faso (INERA), des actions sont menées pour permettre aux producteurs de faire face aux changements climatiques. En effet, Dr Noufou Ouédraogo est un chercheur en agronomie et amélioration des plantes, particulièrement sur les céréales traditionnelles. Ses recherches portent sur les céréales traditionnelles telles que le sorgho et le maïs. La principale recherche se base sur l’amélioration génétique du sorgho pour pouvoir mettre au point des nouvelles variétés de sorgho qui s’adaptent aux différentes conditions agro-climatiques du Burkina. Selon lui, le Burkina Faso rencontre d’énormes contraintes, dont celles climatiques qui limitent la production du sorgho.

« Nous avons des pluies qui ne permettent pas à nos parents producteurs de produire jusqu’à la fin de la saison pluvieuse, du coup, nous nous sommes dit qu’en travaillant à améliorer certaines variétés, nous pourrons donc contribuer, à notre manière, à mettre au point des variétés qui vont permettre aux producteurs d’assurer leur production, d’atteindre l’autosuffisance alimentaire et la sécurité alimentaire », lance-t-il.

Il est à noter que face aux changements climatiques, les arbres sont un facteur clé dans les recherches de solutions. C’est pourquoi Dr Sanou préconise la promotion de l’agroforesterie. « Avoir plus d’arbres dans le champ va favoriser beaucoup d’infiltration en cas de fortes pluies et d’inondation et aussi en cas de sécheresse, les arbres sur le champ vont constituer un microclimat qui va maintenir un certain niveau d’humidité dans le sol pendant longtemps, et ces champs vont moins ressentir la sécheresse que le champ où il y a moins d’arbres », commente-t-il.
Il invite ainsi les populations à prendre conscience que la plantation des arbres ou l’entretien et le maintien des arbres qui existent déjà est un devoir pour tout un chacun. « C’est vrai que l’arbre, l’intérêt n’est pas individuels, mais, il faut que chacun mette du sien pour sauvegarder, accroitre si possible, le couvert végétal. Cela va nous permettre d’atténuer les changements climatiques et de nous adapter, c’est-à-dire, réguler la température de notre environnement et l’humidité du sol », conclu Dr Sanou Josias, Chercheur de l’INERA département environnement et forêt, spécialité écophysiologie l’agroforesterie de l’INERA.


Article écrit dans le cadre de la création d’un réseau international de jeunes journalistes enquêtant sur les Objectifs de développement durable afin de sensibiliser les populations au respect de ceux-ci.
Organisation Internationale de la Francophonie ; Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères (France) ; Ministère de la Francophonie (Québec) : Principauté d’Andorre.
Avec le soutien de l’École supérieure de journalisme de Lille (France) et de l’Institut francophone du Développement durable (Québec).

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