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CÔTE D’IVOIRE - Retour sur l’année 2016-2017

CÔTE D’IVOIRE - Retour sur l’année 2016-2017

31 octobre 2016 - par Kanaté Dahouda 
Alassane Ouattara reconduit en takoklé ! (Ph : Flickr - Africanews Channel)

POLITIQUE

Après la grave crise post-électorale de 2010-2011, la Côte d’Ivoire a vécu, le 25 octobre 2015, une élection présidentielle qui s’est déroulée dans la paix, grâce notamment au sens de responsabilité de ses leaders politiques. Au terme de ce scrutin, le président Alassane Dramane Ouattara (ADO) a été réélu en takoklé (c’est-à-dire dès le premier tour), selon la commission électorale indépendante, avec 83,66 % des voix contre 9, 29 % pour Pascal Affi NGuessan, chef officiel du Front Populaire Ivoirien fondé par l’ex-président Laurent Gbagbo. Ce dernier est détenu à la Cour pénale internationale où il subit, avec Blé Goudé (ancien ténor de la galaxie patriotique), un procès dans lequel tous les deux sont poursuivis pour « crime contre l’humanité ». Le camp pour la libération de « Gbagbo ou rien » - rangé derrière Abou Drahamane Sangaré - a préféré boycotter les présidentielles, créant ainsi une division au sein de l’opposition, division qui a profité à Alassane Ouattara, candidat unique du Rassemblement des Houphouétistes pour la Démocratie et la Paix. L’élection présidentielle a été jugée globalement crédible et transparente par les observateurs internationaux ; mais cela n’a pas empêché une frange de l’opposition de qualifier le scrutin de « mascarade électorale ». Sorti victorieux des urnes, le chef de l’État a, de son côté, tenu à progresser avec son ancien Premier ministre, Daniel Kablan Duncan, qu’il a reconduit, le 7 janvier 2016, au poste de chef du gouvernement. Le 12 janvier, Ducan a constitué « un gouvernement de combat et de mission » déterminé à réaliser « les engagements que le chef de l’État a pris devant la nation ivoirienne », en vue de faire de la Côte d’Ivoire « un pays émergent à l’horizon 2020 ».

Parmi ces engagements, le renforcement des institutions occupe une place de choix, avec notamment l’élaboration de la Constitution de la 3e République qui fut, en effet, «  l’une des promesses de campagne de Ouattara ». Le chef de l’État a nommé un éminent juriste, Ouraga Obou, à la tête d’un comité d’experts « chargé de mener la réflexion sur ce projet de constitution ». Dans le cadre de la consultation sur la constitution, il a ensuite reçu à la présidence de la République, dans le courant de juin-juillet 2016, les partis politiques (ceux de l’opposition y compris), les guides religieux, les chefs et les rois traditionnels, les femmes, la société civile, et la jeunesse. Selon lui, il s’agissait, à travers la participation inclusive de ces couches de la population, de recueillir une diversité d’opinions sur les enjeux de la réforme constitutionnelle, qui devra plus tard faire l’objet d’un référendum dans la période de septembre à octobre, suivi des législatives en novembre-décembre. La société civile a fait des propositions constructives, après avoir salué l’initiative du président de la République sur les points suivants : la limitation du mandant présidentiel renouvelable qu’une seule fois, les conditions d’éligibilité au poste de président, la création d’un poste de Vice-président ainsi que d’un Sénat, le Conseil économique et social.

L’opposition non gouvernementale a jugé le processus de la révision constitutionnelle « inique et inopportune » (Coalition Nationale pour le Changement). Au nom du Front Populaire ivoirien, Affi NGuessan a, quant à lui, marqué son désaccord au projet en ces termes : « Sur la nature du régime, nous ne sommes pas d’accord avec la proposition du chef de l’État de mettre en place un exécutif tricéphale, avec un président, un vice-président et Premier ministre. Nous ne sommes pas d’accord en ce qui concerne les rapports entre le législatif et l’exécutif […] ». En réaction, la coalition au pouvoir a plutôt souligné la nécessité impérieuse de réviser la constitution, pour y extirper les articles confligènes, afin surtout d’éviter de retomber dans les dérives du passé. Pour l’essentiel, le parti au pouvoir vise à élaborer un texte consensuel sur les bases d’un nouveau contrat social inspiré par l’éthique du vivre ensemble dans le respect des institutions démocratiques, des principes de la bonne gouvernance et de la diversité socio-culturelle.

Outre la constitution, la question de la justice ainsi que le problème des détenus politiques et des exilés pro-Gbagbo ont marqué les débats politiques au cours des années 2015-2016. Après avoir été condamnée à 20 ans de prison en 2015 pour « atteinte à la sureté de l’État », Simone Gbagbo continue de comparaître, depuis la fin du mois de mai 2016, devant la Cour d’Assises d’Abidjan « pour de présumés faits de génocide, de crimes de guerres, et de crimes contre l’humanité » commis dans le contexte des violences post-électorales (entre le 12 décembre 2010 et le 12 avril 2011). L’ex-première dame est réclamée par la Cour Pénale Internationale pour les mêmes chefs d’accusation. Mais le régime d’Abidjan refuse de la transférer à La Haye, préférant la juger en Côte d’Ivoire où les autorités en place estiment que le système de justice est désormais sur les rails, dans la mesure où il est maintenant « capable de respecter les exigences de la justice internationales en matière procédures pénales et judiciaires ». Considéré de procès politique par l’opposition officielle, le jugement de Simone Gbagbo a donné à celle-ci des minutions pour dénoncer la fameuse « justice des vainqueurs » dont ses partisans seraient victimes de la part du pouvoir en place. Les inculpations en 2015 de Chérif Ousmane et Losséni Fofana (chefs militaires des ex-Forces nouvelles ayant soutenu Ouattara) avaient pour objectif de changer cette perception des choses. Elles ont certes été accueillies par les ligues pour la défense des droits de l’homme comme des pas salutaires vers une décrispation sociale ; mais pour l’opposition, elles demeurent insuffisantes pour rétablir la foi en la justice et au processus de réconciliation.

Pour décanter la situation, Alassane Ouattara a accordé la grâce présidentielle à plus de 3000 détenus de la crise post-électorale. Cette action a été saluée, le samedi 2 janvier 2016, par la représentante spéciale du secrétaire général des Nations unies en Côte d’Ivoire, Aïchatou Mindaoudou Souleymane, qui en a profité pour inviter les acteurs politiques à « œuvrer pour le renforcement de la cohésion sociale et de la réconciliation nationale ». Son appel sera-t-il entendu par les signataires de la pétition internationale qui font de la libération de Laurent Gbagbo « une exigence politique, démocratique et un impératif pour la réconciliation nationale » ? Espérons que la reprise du dialogue politique entre le pouvoir et l’opposition officielle contribuera un jour à créer les conditions viables d’un rapprochement entre les deux camps, dans l’intérêt supérieur de la Nation ivoirienne.


Le quartier des affaires sur le Plateau à Abidjan (Ph : Flickr - Citizen59)

ÉCONOMIE ET SOCIÉTÉ

« Si, en 2010, notre programme a parlé au cœur des Ivoiriens, nous sommes convaincus qu’en 2015, ce sont nos actions qui parleront pour nous ». (président Ouattara). Pour le faire élire, ses partisans ont ainsi jugé bon de miser sur le bilan de ses actions, en mettant surtout en avant les nombreuses infrastructures qu’il a réalisées à travers le pays au cours des cinq dernières années : construction d’écoles et d’universités, de ponts et d’autoroutes ; électrification de plusieurs localités urbaines et villageoises, alimentation en eau ; construction ou réhabilitation d’hôpitaux et de centres de santé (dispensaires et maternités). Pour rattraper le retard causé par la crise et la guerre, le pouvoir en place a aussi promis d’exécuter plusieurs autres projets de développement de nature à impulser la dynamique économique du pays. Au nombre de ces travaux d’envergure, mentions le vaste programme de réhabilitation des voiries dans toutes les capitales régionales du pays, ainsi que les travaux relatifs à « Notre Métro d’Abidjan » qui vise à « désengorger » cette ville, tout en « lui donnant l’allure des grandes métropoles mondiales ». De 2015 à 2016, la santé économique du pays a été mesurée à l’aune de plusieurs paramètres : la confiance des investisseurs dans la vitalité retrouvée du pays, l’amélioration du climat des affaires, l’image rehaussée d’une Côte d’Ivoire redevenue « fréquentable et respectée » dans le concert des Nations, la revalorisation du salaire des fonctionnaires, l’augmentation du pouvoir d’achat des paysans et des agriculteurs, la construction de logements sociaux en vue d’améliorer les conditions de vie des populations, etc.

Grâce aux performances économiques réalisées ces dernières années par le gouvernement Duncan, la Côte d’Ivoire a renoué avec la croissance, si l’on en croit des bailleurs de fonds : « La croissance de la Côte d’Ivoire estimée à -4,4 % en 2011, après la crise postélectorale, a connu un bond en 2012 avec 10,7 %, avant de s’établir à 8, 7 % en 2013, 7, 9 en 2014, puis 8,4 en 2015 », selon un rapport du Fonds Monétaire International. Au mois de décembre de la même année 2015, le directeur des Opérations de la Banque Mondiale a félicité la Côte d’Ivoire pour les « progrès exceptionnels » accomplis au plan économique. Pierre Laporte n’a cependant pas manqué de relever que « cette embellie économique » doit contribuer à réduire la pauvreté et améliorer le quotidien des citoyens. L’opposant et président du parti LIDER, Mamadou Koulibaly, a, en d’autres circonstances, vertement critiqué cette embellie économique en ces termes : « Nous avons certes entendu parler de croissance à deux chiffres qui devait arriver, pourtant dans nos assiettes nous n’avons vu prospérer que la pauvreté ».

Sans nécessairement partager ce sombre diagnostic, le ministre Mabri Toikeuse, dans une entrevue à Jeune Afrique reconnaît cependant que la mise en place du Programme National de Développement a pris du temps, avant d’ajouter ceci : « Ce que nous avons commencé à faire, timidement c’est vrai, c’est de rendre cette croissance inclusive. C’est-à-dire faire en sorte qu’elle bénéficie au plus grand nombre. Ce sera l’enjeu du second mandat du président de la République ». Le président a confirmé cela dans son message de Nouvel An 2016 adressé à la Nation ivoirienne qui, selon lui, « dispose aujourd’hui de tous les atouts » nécessaires pour concrétiser la croissance « pour le bien-être de chaque Ivoirien ». Mais la patience du citoyen lambda continue d’être mise à rude épreuve par la cherté de la vie, la pénurie des denrées alimentaires de base (que sont l’attiéké, la banane et la tomate), le chômage des jeunes.

C’est dans ce contexte social qu’au mois de juillet 2016, les tensions sociales (nourries par les rancœurs et les frustrations de la population) ont dégénéré en manifestations violentes contre « la hausse des tarifs de l’électricité jugée excessive par les consommateurs qui craignent que cette hausse ne se répercute sur le prix des produits de la vie courante ». Outre la question de la cherté de la vie, la sécurité constitue pour le gouvernement ivoirien l’un des défis à relever. Après la crise post-électorale, les autorités avaient remarquablement réussi à ramener l’indice de sécurité du pays au « même niveau que celles de New York et Genève ». Ce succès a été malheureusement écorché par l’attaque djihadiste du dimanche 13 mars 2016 qui fit 18 morts dans la station balnéaire de Grand-Bassam. Le président Ouattara a dénoncé cette attaque « terroriste » revendiquée par Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). Il en a profité pour féliciter l’armée et les forces de sécurité pour leur courage exemplaire, puis a promis de travailler pour l’amélioration de leur condition de vie et de travail. Dans son combat contre les poches résiduelles d’insécurité, le gouvernement a aussi promis de s’attaquer à la violence criminelle des microbes, enfants désœuvrés qui continuent de semer la désolation dans les quartiers d’Abidjan ainsi que dans les villes de l’intérieur. Ceux-ci ont fait l’objet d’un documentaire - Phénoménologie de la violence criminelle dans les villes ivoiriennes - qui aidera certainement le gouvernement dans sa lutte contre les raids menés par ces jeunes délinquants, mais aussi dans son effort de réinsertion sociale de ces enfants.

Malgré ces défis en matière sécuritaire, la Côte d’Ivoire demeure une destination sûre avec une économie en forte croissance. Avec son retour sur la scène de la diplomatie au sein de la CEDEAO, de l’Union africaine et de l’UEMOA, elle est en voie de redevenir une puissance économique sous régionale qui suscite le respect des partenaires et opérateurs économiques œuvrant dans le monde de la finance internationale. Ses avancées importantes seront-elles suffisantes pour convaincre tous les Ivoiriens de partager la foi du président ADO en l’avenir d’une Côte d’Ivoire prospère qu’il entend mener à l’émergence à l’horizon 2020 ? Au plan social, cela dépendra, en partie du moins, de la distribution plus juste et équitable des fruits et des bénéfices générés par la croissance économique. Une croissance dont le gouvernement veut cultiver au maximum toutes les phases afin de pouvoir réaliser un « nouveau miracle ivoirien », après celui des années 1970 forgé avec ardeur par Félix Houphouët Boigny, premier président de la Côte d’Ivoire. Nous lui souhaitons de réussir son pari sur la nostalgie, qui semble ici jouer comme une force d’avenir, voire d’émergence.

La ministre de l’Enseignement supérieur, Ramata Nakayoko-Ly et le recteur de l’Agence Universitaire de la Francophonie renforcent les liens (Ph : Flickr - ministère de l’Enseignement sup CI)

CULTURE- SPORT

« Grâce à vous, la Côte d’Ivoire est rassemblée à nouveau ». Ainsi s’exprimait le président Alassane Ouattara pour mettre fièrement en exergue « le sentiment d’unité nationale » suscité par le sacre, en 2015, des Éléphants, l’équipe nationale de football qui a remporté la Coupe Africaine des Nations. En 2016, le même sentiment d’unité nationale a été inspiré par les Taekwondoïstes Cheick Cissé (médaillé d’or à Rio) et Ruth Gbagbi (médaillée de bronze), ainsi que par les sprinteurs Marie-Josée Ta Lou (4e du 100 et du 200 m) et Ben Méité (6e du 100m). Ces quatre athlètes des Jeux olympiques de Rio (Brésil) ont été récompensés par l’État ivoirien, avant d’être faits officiers de l’Ordre national. Lors de la cérémonie à la présidence, les athlètes ont plaidé pour plus de soutien : « On a été soutenu. L’État a fait ce qu’il pouvait (...) mais il faut que des lois soient prises (...) pour que le sportif d’aujourd’hui puisse se nourrir de son sport », a déclaré Cheick Cissé au nom de ses pairs.


Rio, un bon souvenir pour la délégation ivoirienne (Ph : Flickr - Africanews Channel)

Vivre de son travail constitue en effet une préoccupation majeure pour tous les athlètes ivoiriens. Ils ne sont pas seuls dans cette situation de précarité, qu’ils partagent malheureusement avec les artistes, les agents et artisans de la culture, comme en témoignent ces propos éloquents d’un super ministre du gouvernement Duncan : « Quand on regarde […] l’ordre des des grandeurs des fortunes dans les pays riches, c’est d’abord les artistes avec les sportifs. Ici dans nos pays, ce sont les fonctionnaires et les politiques après viennent les artistes. Notre devoir […] c’est d’inverser cette tendance. Nous devons faire en sorte qu’ils [les artistes] vivent de leur art…  » Ces propos ont été tenus par Hamed Bakayoko, ministre d’État, ministre de l’Intérieur et de la Sécurité, lors du concert d’ouverture de la 9e édition du Marché des Arts du spectacle africain (MASA) organisée à Abidjan sous le thème : « Réinventons les arts de la scène » (5 mars 2016. Palais de la Culture).

Tiken Jah Fakoly, victime des pirates ? (Ph : Page Facebook de TJ Fakoly)

En effet, la réinvention des arts et la valorisation des secteurs de la culture passent nécessairement par une politique de soutien, de promotion et de vente des produits de création sur le marché local, mais aussi international. Évidemment cette politique sera vouée à l’échec si l’État ne prend pas, par exemple, des mesures répressives contre les pirates qui continuent à dupliquer en toute impunité les œuvres des artistes et musiciens dans les grands carrefours d’Abidjan et des autres grandes villes du pays. En attendant des actions vigoureuses du ministère de la Culture et de la Francophonie dans ce domaine, les artisans de l’art et les professionnels de la culture poursuivent leurs œuvres de création et de promotion. C’est ainsi qu’au mois de février 2016, nous avons, grâce aux professionnels de la culture, assisté au lancement de la deuxième édition du Salon International des Langues d’Abidjan (Silang) dont l’un des objectifs est de faire la promotion des langues locales, puis de permettre l’apprentissage rapide et l’alphabétisation dans les langues maternelles. Cela est d’autant plus important que « l’Ivoirien nouveau est celui qui est ancré sa culture avant de s’ouvrir au monde », estime Mme Diaby, représentant du ministre de l’Éducation nationale lors de cette rencontre internationale. Le rendez-vous du donner et du recevoir passe aussi par la bonne pratique d’une langue étrangère, en l’occurrence, le français, pour le cas de la Côte d’Ivoire, qui se prépare, par ailleurs, à accueillir la huitième édition des Jeux de la Francophonie de 2017.

Bien avant cet évènement de grande envergure, plusieurs ouvrages ont déjà paru (ou verront le jour) sur la francophonie en contexte ivoirien. Rappelons la publication du livre d’Abraham Gbogbou intitulé : « Perfectionnement de la langue : les pollutions auditives et visuelles : comment les éviter ? » Présenté officiellement au mois d’avril 2016, cet ouvrage fait surtout la promotion du français contre les ivoirismes qui gagneraient du terrain en Côte d’Ivoire. Français tropicalisé, ces ivoirismes sont rejetés par certains comme « parlers de la masse populaire » qui dessert la langue de Molière, lors que d’autres les valorisent comme « outils de construction identitaire ».

On se souviendra que les questions identitaires ont été source de conflits meurtriers en Côte d’Ivoire, notamment après la crise post-électorale de 2010-201. Cette crise a continué de servir de matière à plusieurs livres parus au cours des années 2015-2016. Nous pensons au livre de Venance Konan, Chroniques des Temps de Braise (2015). Lu comme « un livre-procès » par des critiques et apprécié par des lecteurs comme « un livre-vérité », l’ouvrage nous invite surtout à un devoir de mémoire sur la parenthèse de sang que fut la période de la crise post-électorale. Les séquelles de cette crise (ethnico-politique, religieuse et armée) sont visibles sur le corps d’un Ivoirien, Joël Poté, qui fut « enlevé et battu à sang pour ses convictions politiques ». Son corps fracturé est le témoin désolé de la tragédie ivoirienne. Mais au lieu de traduire ses bourreaux devant la justice, Poté a préféré produire, en 2016, un livre de témoignage – Côte d’Ivoire. Fais le pas vers le pardon – dans lequel il invite les Ivoiriens à apprendre à vivre ensemble. C’est le même son de cloche en faveur du « vivre ensemble » qu’on entend chez Cheick Yvhane qui estime que, malgré les divergences, la quête pour l’unité nationale et la cohésion sociale doit se concrétiser pour le bonheur de tous les Ivoiriens. Nécessité impérieuse que son livre suggère dans ce titre cocasse et catégorique : Côte d’Ivoire. On va se réconcilier Pian ! (2016).

Vivement donc la réconciliation, pour panser les plaies d’une Côte d’Ivoire qui aspire à l’émergence d’un Ivoirien nouveau : portrait-type de l’homme qui sait promouvoir les vertus du pardon et de l’amour, mais aussi symbole du citoyen honorable et intègre qui sait cultiver la discipline et l’excellence, avec un sens élevé de la responsabilité innervé par la vision noble d’un patriotisme ouvert aux richesses de la diversité humaine.

Kanaté Dahouda
Chef du Département des études françaises et Professeur d’Études francophones aux Collèges universitaires Hobart and William Smith, Geneva, New York.

dahouda@hws.edu


Photo du logo : Flickr - Doctors of the world

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