francophonie, OIF, Francophonie, Organisation Internationale de la Francophonie, langue française, diplomatie culturelle, littérature, théâtre, festival, diversité culturelle, les francophonies

MENU
Dominique Bromberger , pérégrination dans la chaotique Russie !

Dominique Bromberger , pérégrination dans la chaotique Russie !

Extraits de "C’est ça la Russie" - Actes Sud

Un livre jubilatoire pour un pays chaotique ! Ce journaliste s’est offert le luxe d’un voyage sans autre motivation que celle « d’aller voir » comment se porte la Russie d’aujourd’hui.

24 mai 2010 - par Arnaud Galy 

Après une carrière bien remplie à la télévision ou à la radio en tant que journaliste spécialisé dans le décryptage de l’information internationale, Dominique Bromberger s’est offert un voyage en Russie. Reprenant une tradition initiée par d’illustres prédécesseurs tels de Custine, Dumas ou Gide, Dominique Bromberger a voulu remettre ses pas où il les avait posé en 1966 lors d’un voyage familial initiatique. C’était alors l’époque du soviétisme obscur et pesant. Aujourd’hui la Russie a basculé du côté du libéralisme le plus échevelé, il était temps pour lui de s’imprégner à nouveau de l’atmosphère de ce si vaste pays. « C’est ça la Russie » se présente comme une suite de rencontres à l’image du pays : chaotique ! Gens du peuple chez qui il loge la plupart du temps ; intellectuels maniant une langue de bois rappelant « joyeusement » l’URSS d’avant ; hommes d’affaires dont on ne sait jamais trop bien de quel côté de la ligne jaune de l’honnêteté ils penchent ; francophones du genre « vieille France » ou du genre « décomplexé »... De Saint-Pétersbourg à Moscou, de Kazan à Irkoutsk, de Saratov à Groznyï... Dominique Bromberger dresse une galerie de portraits enlevés, désabusés, piquants ou attendris. Les connaisseurs de la Russie liront, un sourire aux coins des lèvres, ayant l’étrange impression d’avoir vécu les scènes observées par le journaliste. Ceux qui n’ont jamais mis les pieds sur les bords de la Volga seront soit irrémédiablement attirés ou définitivement repoussés : à chacun son caractère !

Ce pays à l’échelle d’un continent a-t-il tourné la page de l’histoire soviétique ? S’enlise-t-il dans un mouvement de décomposition inexorable ? Surprendra-t-il le monde en acceptant enfin de jouer avec les mêmes cartes et les mêmes règles que les autres pays ? Acceptera-t-il un jour de ne plus voir en l’Autre un ennemi potentiel ? Dominique Bromberger ne semble pas en mesure de répondre fermement. Son voyage personnel, subjectif et intuitif ne fut pas organisé pour cela. Qu’importe, la lecture de son carnet de route est jubilatoire et riche d’histoire où l’Homme est au centre de l’Histoire.

EXTRAIT

« La foire qui faisait rêver Théophile »

… Diana est le produit d’une union très exotique. Son père était guinéen et sa mère ukrainienne. Le jeune étudiant africain, issu d’un pays qui avait rompu avec la France et l’Occident, avait été envoyé poursuivre ses études dans le sud de l’URSS, peut-être en échange de l’un de ces chasse-neige dont le débarquement à Conakry provoqua, dans le courant des années 1960, des scènes de franches rigolades...

… Un coup d’œilsur l’embouchure de l’Oka et de la Volga et nous entreprenons la descente vers la ville basse, à commencer par le quartier qui s’étend de notre côté de l’Oka au pied du kremlin ; nous passons devant des églises dont les unes sont en rénovation, les autres encombrées de fidèles. Les offices durent souvent trois heures et nous sommes dimanche ; je renonce donc à y pénétrer. Je préfère rendre visite aux infidèles. Diana ne s’est évidemment pas munie d’un maillot de bain pour jouer au guide et elle m’a vivement déconseillée de me baigner dans la Volga. Je le regrette un peu parce que les touristes russes qui descendent le fleuve en bateau pour leurs congés annuels, eux, ne s’en privent pas. Ils prennent le soleil sur les marches du port et le frais dans le fleuve. Mais, bien sûr, ensuite ils ont la possibilité d’aller se changer dans leur cabine. Il y a, allongées sur le ciment, pas mal de bedaines enflées par la bière, mais aussi quelques filles superbes aux jambes interminables, à la silhouette souple et élancée. (page 163)

EXTRAIT

« Alphonse, un chat en exil »

Akademgorodok est une citée qui fut créée, au milieu de la forêt sibérienne, dans les années 1960 pour accueillir les plus brillants scientifiques d’URSS. Une trentaine de kilomètres seulement la sépare de Novossibirsk...

… Le trajet en vaut pourtant doublement la peine. D’abord parce que Akademgorodok , pour qui connaît les autres réalisations urbaines de l’époque, a tout d’un mirage. De petits immeubles aux ton pastels sont éparpillés dans les bois ; ils abritent de vastes appartements, très vastes et très confortables si on les compare à ce qui se fait ailleurs ans le pays. Ensuite parce que la plupart des gens que l’on y rencontre, savants et ingénieurs, débarrassés des soucis du quotidien, tiennent souvent des propos très intéressants.

C’est ici que furent élaborées les principales percées scientifiques qui permirent longtemps à l’URSS de tenir la dragée haute au monde occidental dans les domaines militaire et spatial.
Aujourd’hui, c’est dans cet étonnant réservoir de cerveaux que viennent piocher les universités américaines...

… Mon hôtesse de la nuit, prévenue par téléphone portable, m’attend sur le pas de sa porte... Katia, c’est son nom, présente avec fierté l’appartement qu’elle partage avec ses parents. Son père, physicien, est né à Krasnoïarsk, au cœur de la Sibérie, tandis que sa mère, naturaliste, est originaire de Rostov-sur-le-Don. Katia déborde littéralement d’enthousiasme quand elle parle de sa ville. Ce pourrait être une déformation professionnelle car c’est elle qui est chargée d’accompagner la visite des voyageurs francophones. Elle pense certainement que mon passage, si il est bien exploité, pourrait être très utile. Ce livre, que je vais rédiger, s’il présente sa ville sous un angle favorable, pourrait donner envie à des scientifiques ou encore à des étudiants français, car il y a ici une grande université, de venir y poursuivre leurs travaux ou leurs étude. Quelqu’un qui n’a rien demandé réside dans l’appartement de Katia : c’est le chat Alphonse. Le matou, très affectueux, trop affectueux, je m’en apercevrai pendant la nuit, a reçu ce nom parce que sa maîtresse s’est éprise pendant son séjour en France des Lettres de mon moulin et de leur auteur. Alphonse est certainement le premier, et le seul, chat français relégué en Sibérie. À l’instant où nous nous sommes rencontrés, il a dû me reconnaître pour son compatriote car il vient se frotter aussitôt contre mes jambes. Peut-être est-ce une supplication muette d’avertir le consulat le plus proche du rapt dont il a été l’objet... (page 219, 220)

Dominique Bromberger

C’est ça la Russie

Actes Sud - 2010

Partagez cette page sur votre réseau :

Précédents Agora mag