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L’OIF se souvient de Léopold Sédar Senghor

L’OIF se souvient de Léopold Sédar Senghor

Rendre à Sédar ce qui est à Sédar ! Par Nguyen Dac Nhu-Mai

Jamais absent de la mémoire des francophones, Senghor l’est encore moins en cette fin d’année 2011, voilà 10 ans que le politique et poète de la négritude a quitté "ceux qui ont le français en partage" !

10 octobre 2011 - par Nguyen Dac Nhu-Mai 
Le spectacle musical et poétique « Chants d’ombre » - © Cyril Bailleul - OIF
Le spectacle musical et poétique « Chants d’ombre »
© Cyril Bailleul - OIF
Léopold Sédar Senghor

Rendre à Sédar ce qui est à Sédar : impact de la mercatique de la francophonie.

En ce dimanche 9 octobre 2011, anniversaire de Léopold Sédar Senghor (1), famille, et amis ont une pensée particulière pour l’homme qui de la négritude à l’universel a mis sens dessous sens dessus le monde de la pensée en France et au Sénégal.

En effet, un grand Hommage à Léopold Sédar Senghor (1906-2001) orphée noir, avocat de la langue française et père de la francophonie a été rendu lors du colloque du 6 octobre 2011 au siège de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), en présence de S.E.M.Abdou Diouf, Secrétaire général de la Francophonie qui a inauguré la plaque commémorative, donnant ainsi au 19-21 Avenue Bosquet 75007 Paris, une empreinte ineffaçable du poète et président du Sénégal.

Ce colloque en réunissant plus d’une centaine de personnes du monde des lettres et des arts, des poètes, des écrivains, des journalistes, des hommes et femmes de diverses organisations françaises et sénégalaises a été un acte de fidélité et une journée d’émotions et de souvenirs égrainés par diverses personnalités françaises et sénégalaises.

Dans son allocution d’ouverture du colloque, M. Clément Duhaime, Administrateur de l’OIF, a souligné l’importance donnée à l’homme d’Etat du Sénégal, de grande sagesse, qui a remarquablement allié le terroir à l’universel.

Ensuite vient un spectacle poétique et musical, créé à l’occasion du festival d’Avignon 2011 et présenté à l’espace Senghor de Morières-lès-Avignon, qui a charmé l’assistance par la coordination de chants sénégalais et des lectures de poèmes écrits par Léopold Sédar Senghor. Chants et poèmes récités ont été scandés par le tam tam, cet instrument de percussion d’origine asiatique très apprécié par les compositeurs occidentaux en raison de l’effet dramatique produit par sa sonorité profonde et métallique. Dès lors, les poèmes récités par M. Yanecko Romba, Chants d’ombre, Prières aux masques, Nuit de Sine, Je me suis réveillé, C’est le temps de partir, Que m’accompagnent Koras et balafons, Car je suis fatigué, Lettre à un poète, ont pris une chaleur humaniste de la négritude. Et tous ces chants poétiques sont devenus des champs des possibles.

Le sourcier pour demain par M. Hamidou Sall, chargé de mission auprès du Secrétaire général de la Francophonie, est un ensemble du vécu de Léopold Sédar Senghor, sénégalais devenu normand par adoption. Il a décrit la magie du verbe qui s’est déclinée des palmiers aux pommiers.

La projection d’extraits de Léopold Sédar Senghor, de la négritude à l’universel du magazine Espace francophone ( par Dominique Gallet, Mona Makki, As Thiam) permet de revoir le visage de l’homme de l’action, de son enfance et de ses parcours. Ses actions défilent sur l’écran et font naître l’espace et le temps, l’espace francophone et le temps de la négritude. Conflits et alliances, ambiance et atmosphère font déchainer les sentiments et les intérêts, les caractères physiques et psychologiques qui cèdent le rythme à la poésie de l’homme africain, le premier grammairien de l’Afrique noire. Ce document à caractère émotionnel comme la projection du message d’Erik Orsenna, de l’Académie française, ont fini par endormir les plus réveillés sur la politique du donner et recevoir. La question qui survient à l’esprit : Qui donne qui reçoit ? est ce la France qui donne et l’Afrique qui reçoit ? ou l’acheminement inverse ?

M. Alain Houlou, ancien élève de l’ENS, professeur agrégé de lettres classiques dans sa présentation "Jusqu’en Sine, jusqu’en Seine, Léopold Sédar Senghor, de l’helléniste à l’humaniste intégral" rappelle comment la passerelle a été construite entre le latin, le grec et les langues du Sénégal (2) et comment l’homme poète et président les a intégrés à l’art et la manière de gouverner le Sénégal tout en ayant à l’esprit le long parcours des hommes qui ont aboli l’esclavage en contournant l’opposition des planteurs.

M. Barthélemy Faye, ancien élève de l’ENS, avocat aux barreaux de Paris et de New York, remet les aiguilles à l’heure du réel dans son intervention du "terroir à l’universel". Tout comme M. Abdou Diouf, les souvenirs sont mêlés à l’alliage rare de la fidélité. A les entendre, la syntaxe et la linguistique forment la richesse de la francophonie et tout doit être "ferme sans cruauté inutile". Alors que la question des langues nationales africaines et de leur enseignement, voire de leur officialisation sont une problématique qui implique le continent dans son ensemble. Depuis la colonisation les pays africains sont marqués par une hybridité linguistique concernant d’une part les langues des colons (britannique, portugais, français..) et d’autre part les langues endogènes ou locales (3). Mais de tout ce qui fâche, le poète Léopold Sédar Senghor n’a-t-il pas dit "j’ai rêvé d’un monde de soleil dans la fraternité de mes frères aux yeux bleus". Ce qui nous ramène à "I have a dream" J’ai un Rêve de Martin Luther King, Jr. dans son discours prononcé sur les marches du Lincoln Memorial, Washington D.C., le 28 août 1963. Comme lui, Léopold Sédar Senghor a-t-il réclamé la promesse que chaque Sénégalais serait assuré de son droit aliénable à la vie, à la liberté et à la poursuite du bonheur ?

Abdou Diouf, inauguration de la salle Senghor à l’OIF
Ph : Cyril Bailleul - OIF

Les participants du colloque se sont joints à M. Abdou Diouf pour saluer ce créateur hors pair qui a dit "Que j’écrive un poème ou que je décide l’élaboration d’un projet de loi, il s’agit de la même chose sous deux aspects différents, il s’agit de transformer le monde". Toutefois, pour transformer le monde nous devons commencer par nous-mêmes ; et dès lors ce qui importe, c’est l’intention. Les prophètes ne cessent de le clamer.

L’ambassadeur Henri Senghor, au nom de la famille, a remercié les organisateurs et les participants du colloque qui a été clôturé par une réception.

Nous pensons qu’il faut rendre à Sédar ce qui est à Sédar et au monde francophone, des idées humanistes pleines de solidarité, dans toutes les têtes ayant le français en partage, selon la mercatique de la Francophonie.


Notes :

(1) : Né le 9 octobre 1906 à Joal et décédé le 20 décembre 2001 à Verson, symbole majeur de la francophonie en Afrique, Léopold Sédar Senghor a fait d’abord ses études au Sénégal, à la mission catholique de Ngasobil, puis à Dakar, et enfin à Paris, au lycée Louis Le Grand et à la Sorbonne. Il est reçu à l’agrégation de grammaire en 1935 et commence à enseigner à Tours, tout en suivant les cours de linguistique négro-africaine à l’Ecole pratique des hautes études et à l’Institut d’ethnologie de Paris. Héros de la Seconde Guerre mondiale, il est mobilisé en 1939, fait prisonnier dès juin 1940 puis réformé pour maladie deux ans plus tard. Il entre alors dans la Résistance. L’année 1945 est un cap important dans la vie de Léopold Sédar Senghor. Elle marque le début de sa carrière politique. Il devient député du Sénégal en 1946 puis occupe diverses fonctions au Conseil de l’Europe, à l’Unesco et à l’ONU. En France, il est secrétaire d’Etat à la présidence du Conseil dans le cabinet d’Edgar Faure entre 1955 et 1956 et ministre-conseiller du gouvernement de la République française en 1959. Dans sa patrie de naissance, le Sénégal, il devient maire de Thiès en 1956 avant d’être élu premier président de la République du Sénégal en 1960. Il ne quittera ce poste qu’en 1980. Côté lettres, il est l’auteur de nombreux ouvrages de poésie et d’essais. Il est d’ailleurs primé à maintes reprises et reçoit notamment la médaille d’or de la langue française. Docteur honoris causa de trente-sept universités, Léopold Sédar Senghor est élu à l’Académie française en 1983.
in http://www.evene.fr/celebre/biographie/leopold-sedar-senghor-1495.php

(2) : Selon M. Abdou Diouf, "Il y a, au Sénégal, six langues qui ont reçu le statut de langues nationales : le wolof, le sérère, le poular, le mandingue, le soninké et le diola. Ces langues ont été retenues officiellement pour la communication dans les médias, et pour l’enseignement. Mais le français reste la langue officielle".

(3) : http://www.memoireonline.com/04/11/4437/m_Analyses-des-blocages-de-lintroduction-des-langues-nationales-dans : Analyses des blocages de l’introduction des langues nationales dans l’enseignement élémentaire formel au Sénégal : étude dans la commune de Fatick : Dans les années 1990, cette perspective est soulevée par Joseph Ki Zerbo lorsqu’il mentionne : « l’éducation est une fonction de reproduction et de dépassement social indispensable au progrès de tout pays. Quand cette fonction est abolie, il se produit un dépérissement profond dans le métabolisme de base de la société. C’est le cas en Afrique, où l’école, au lieu de reproduire les sociétés à un niveau supérieur contribue à les mettre en pièces détachées. L’appareil éducatif, au lieu d’être un moteur, est une bombe à retardement qui, compte tenu de la flambée démographique, épuise les ressources économiques sans contre partie suffisante, désintègre les structures sociales et stérilise les cultures ».voilà donc comment Joseph Ki Zerbo (du Burkina Faso) a analysé l’école africaine dans son ensemble qui, vu son déphasage avec nos réalités sociales, ne reflète guère notre identité socioéconomique. Au Sénégal, depuis l’indépendance, des politiques sur les langues nationales ont été, avec contraste, avancées en vue de leur `’promotion’’ dans un système éducatif. Dans cette optique, l’Etat s’engage dans une perspective de consolidation de l’unité nationale, de construction nationale et ambitionne de prendre en charge l’ensemble des impératifs politiques et socio éducatifs (`’Etat -providence’’) en vue de l’instauration d’un `’Etat fort’’. Au plan éducatif, surtout l’école, l’Etat sénégalais avait jugé suffisant au moment de son accession à l’indépendance l’héritage colonial d’un enseignement moderne avec taux de scolarisation satisfaisant. Il omettait cependant la valeur du contenu de l’école prise sous l’angle socioculturel avec ses impacts dans la société, en reproduisant les valeurs de l’école blanche dont le dessein était d’effacer progressivement les cultures sociales des colonisés.

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