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Carnets Vanteaux - Une vie, des slogans

Carnets Vanteaux - Une vie, des slogans

7 juin 2022 - par Gabrielle Lasowski 
 - © Pixabay - Pexels
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Consigne : réécriture d’une microfiction de David Thomas, Slogans (Un homme à sa fenêtre, éd. Anne Carrière, Paris, 2019, p. 13-14) dont voici le début :
Ma sexualité a commencé en 1981, année de l’élection de Mitterrand avec le slogan « La force tranquille ». A l’époque, j’étais très jolie et sexy, et chaque fois que je séduisais un garçon cette phrase me revenait en tête tant les choses me semblaient faciles. Pour charmer, je n’avais rien d’autre à faire que d’être là. Sept ans plus tard, c’était l’accroche de Chirac, « Nous irons plus loin ensemble », qui illustrait parfaitement ma vie. J’étais folle amoureuse d’un homme avec qui je me projetais et dont j’étais certaine qu’il me mènerait au plus loin dans le bonheur. (…)

Les Carnets Vanteaux avec l’atelier Microfictions
animé par Milena Mikhaïlova Makarius

A vrai dire, je n’ai jamais vraiment aimé les politiques. Sans doute que ma méconnaissance du milieu, et les mensonges proférés par ces hommes et ces femmes ne m’aidaient pas. Surtout, le slogan de François Mitterrand en 1981, « La force tranquille », ne me convenait pas. Qu’est-ce que cela voulait dire ? Bien que j’eusse vingt-et-un an au moment des élections, je n’ai pas voté, dégoûtée par les hommes et les femmes politiques de l’époque. Ça ne s’est pas arrangé avec le « Nous irons plus loin ensemble », sept ans plus tard, de Jacques Chirac, lui non plus je ne l’aimais pas.
Après Chirac, et les caricatures parfaitement hilarantes de sa personne -je les découpais dans les journaux et en faisait la collection- vint Balladur avec « croire en la France ». N’étant pas spécialement patriote, je n’y croyais pas, moi, en la France. Juste un pays avec une bonne sécurité sociale, selon mon avis du moins, et depuis quelques années le droit à l’avortement. J’en profitais largement, ce qui eut l’occasion de me faire passer les pires mois de ma vie. Il avait fallu beaucoup de temps pour que je m’en remette, mais je ne voulais absolument pas d’enfant. Merci Mitterrand, même si je ne vous appréciais pas.
« La relève, le changement » avec Bayrou m’interloqua. Cette fois-ci je votais pour le parti socialiste, avec Ségolène Royale. Je ne l’aimais pas non plus, mais quelque chose au fond de moi voulait que cette femme forte, aux canines acérées, fasse peut-être une meilleure présidente que messieurs ses concurrents. Je compris ma bissexualité à ce moment-là, et comprenais que si j’aimais tout le monde, j’avais quelque chose pour les femmes qui savent s’imposer.
« Travailler plus pour gagner plus », de Nicolas Sarkozy, petit homme au caractère de cochon, ne me faisait ni chaud ni froid. C’était facile pour lui de dire qu’il fallait se bouger les fesses pour le dire poliment. Cette année-là, je faisais du 7h30-20h30 au bureau. Si je n’adhérais pas au slogan, je le suivais malgré moi. Ce fut cette année que je me pacsais avec Marilyn, j’en étais très heureuse.
Nous déménageâmes à la campagne au bout de quelques années de vie commune, non par amour des mots proférés par Eva Joly, « l’écologie, la solution ». Nous voulions changer d’air, et cela nous fit le plus grand bien.
Finalement, un slogan me marqua au cours de ma vie, « faire battre le cœur de la France ». Car un cœur battait en Marilyn, celui de l’enfant que nous avions décidé d’avoir par insémination artificielle. Elle logeait en son sein le futur d’un pays auquel je n’avais jamais cru, et pour une fois, je voulu croire aux politiques… jusqu’à la prochaine élection.

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