En quelques mots, pouvez-vous nous expliquer votre rôle au sein de l’Université de Piatigorsk ?
- Alexander Pavlovitch Moiseev, doyen de la faculté de Français. Piatigorsk -Russie.
- Ph : Aimablement prêtée par A.P. Moiseev
Étant directeur de l’Institut de francophonie et de "management" en sport et tourisme j’assume des fonctions administratives. La spécificité de l’Institut consiste en ce qu’il comprend la faculté de français dont je suis doyen et le département de la remise en forme sportive. Je gère les activités scolaires et extra-scolaires qui embrassent la vie universitaire. Docteur en didactique des langues étrangères, j’anime aussi les cours d’expression écrite et orale (FLE) et de DLVE (didactique des langues vivantes étrangères).
Qu’est ce qui a provoqué votre francophilie et votre francophonie ?
C’est à l’école que j’ai commencé à apprendre le français. J’aimais apprendre des poésies, des chansons françaises et participer aux spectacles en français. Cela m’a poussé à devenir étudiant de la faculté de français de l’Université de Piatigorsk. Mes études m’ont fait découvrir les horizons culturels francophones. Depuis ma vie professionnelle a connu son épanouissement.
Une partie de votre vie professionnelle s’est déroulée pendant une période politique peu propice aux voyages, quelles étaient vos possibilités de voyager en France ou dans des pays francophones ?
Toujours dans le cadre des accords bilatéraux j’ai plusieurs fois participé aux programmes internationaux : De 1966 à 1968 j’étais interprète d’un groupe d’experts techniques en Guinée (Conakry), de 1978 à 1980 j’ai été assistant de russe dans des lycées lyonnais (Lycée du Parc, Lycée Ampère et autres), et de 1988 à 1992 j’ai été lecteur de russe a l’ENS, rue d’Ulm.
Quand êtes-vous venu en France pour la première fois, dans quel cadre ?
À titre d’assistant de russe à Lyon.
La France correspondait-elle à vos attentes... ? Y retrouviez-vous les « clichés » classiques ou vous surprenait-elle ?
Je dois avouer que la France m’a beaucoup impressionné. C’était si bouleversant de visiter les endroits connus à travers les livres, plusieurs fois parcourus dans mon imagination. D’ailleurs j’ai vu quelques réalités qui mon répugnées : écoliers indisciplinés, pagaille dans des rues, présence des immigrés etc...
… et aujourd’hui, quel regard portez-vous sur la société française ?
La société est bien consolidée, imprégnée de fierté pour son patrimoine culturel et historique, mais elle cherche toujours à s’améliorer et à faire bouger le monde.
Pour vous, la notion de francophonie se résume-t-elle à la France ou jetez-vous un regard curieux et pertinent sur l’espace francophone en général ?
Évidemment j’appartiens à ceux qui ne limitent pas cette notion à la France seulement. Mon expérience africaine et nos relations avec les universités belges et québécoises permettent de me considérer plutôt comme « francophone large d’esprit ».
L’histoire de France et l’actualité montrent une intime proximité entre la France et le continent africain... colonisation, immigration, métissage... comment percevez-vous cette histoire commune qui est souvent méconnue en Russie ou dans les pays de l’ancien « bloc de l’Est » ?
En tant que professionnel dans le domaine de la civilisation française et de la didactique de LVE je voudrais accentuer le fait que cette problématique nous est bien connue sur l’espace post-soviétique : immigration, métissage etc... Chaque grande ville en Russie a son Barbès-Rochechouart ou sa place d’Italie.
- Piatigorsk, au 19eme siècle.
- Ph : Guirlandajo - Wikimedia Commons
Venons-en, si vous voulez bien, à l’université et à la langue française aujourd’hui à Piatigorsk... qu’est-ce qui pousse un(e) jeune russe de Piatigorsk à se diriger vers une filière de langue française ?
La faculté de français est connue dans notre pays ainsi qu’à l’étranger depuis 55 ans. Grâce à son potentiel scientifique, éducatif et professionnel on a pu former des milliers de spécialistes en langue et civilisation française. Parmi nos étudiants on trouve des ressortissants non seulement du Caucase mais aussi de toute la Russie ainsi que de l’étranger. Ce qui les attire est certainement la renommée de la faculté, la beauté de la langue française et la possibilité de se réaliser dans le cadre de la francophonie. Nous sommes prêts à proposer les cursus à la française : la plupart des cours se font en français et sont suivis d’un apprentissage approfondi du russe. Ce qui permet de réaliser un passage souple au russe comme langue d’étude pour les deux années successives : la soutenance des diplômes en russe etc...
A quoi ressemble la France dans l’imaginaire d’un Caucasien qui n’y est jamais venu... ?
Pour les Caucasiens, la France est un pays de l’amour, de la cuisine exceptionnelle, de la mode et du patrimoine... l’un des meilleurs pays.
- Plage de Sochi...
- Ph : Igor Yakunin - Wikimedia Commons
À part l’enseignement, à quoi peut conduire la pratique de la langue française ?
Au tourisme, au commerce international, à l’interprétariat, au management en sport et à la remise en forme, l’ouverture langagière est très large.
La tenue des Jeux Olympiques à Sochi, géographiquement proche de Piatigorsk, provoque-t-elle des débouchés pour les francophones, la langue française étant une langue officielle de l’olympisme ?
Oui, bien sûr, notre Institut a proposé quelques programmes qui visent la formation des bénévoles pour les JO de Sochi. Cela se fait grâce au Centre national de bénévolat de l’Université de Piatigorsk. Il y a une centaine d’étudiants qui participent à ce programme.
… Pour terminer... quel est votre « coin de Paradis » en France ?
Paris, Paris et encore Paris.