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Un mois avant de fêter ses 30 ans d’indépendance, la Moldavie dit un « NON » ferme au passé

Un mois avant de fêter ses 30 ans d’indépendance, la Moldavie dit un « NON » ferme au passé

13 juillet 2021 - par Aneta Gonța 
 - © Page FB de Maia Sandu
© Page FB de Maia Sandu

Après le dépouillement de 100 % des bulletins, le Parti pro-présidentiel Action et Solidarité (PAS), obtient 52,80 % des suffrages, face aux 27,17 % du Bloc formé par les communistes et les socialistes (BECS). Un troisième gagnant, à cheval, d’un billet dans le Parlement moldave est le parti d’un ex-maire de ville avec un parcours controversé, condamné à 7 ans de prison pour avoir participé au vol du système bancaire moldave en 2014, connu comme « le vol du milliard ». Le parti accède avec 5,74 % des suffrages. Traduits en mandats du Parlement unicaméral constitué de 101 députés, les chiffres ci-dessus, répartis selon la méthode D’Hondt, qui privilégie les candidats électoraux ayant le plus de voix au nom des partis n’ayant pas franchi le seuil électoral, signifient 63 sièges pour le PAS, 32 pour le BECS et 6 pour le parti « Șor  ».

Il a fallu, donc, que l’exercice démocratique des élections législatives se répète 10 fois en 30 ans, pour que les citoyens et les citoyennes moldaves donnent une chance claire à un parti pro-européen de commencer de vrais changements. Le résultat obtenu par le parti qui a construit sa campagne électorale sur le programme de la Présidente Maia Sandu, élue en novembre dernier avec un score sans appel, constitue, en fait, la confirmation du vote populaire donné aux présidentielles. C’est surtout l’image de la Présidente qui a ouvert largement les portes du Parlement pour le parti qu’elle a créé en 2016. Même avec le taux de participation le plus faible dans l’histoire des élections législatives (48,41 %), le parti gagnant bat tous les records en ce qui concerne le pourcentage accumulé et ne reste surclassé au nombre de votes que par les communistes en 2001.

Le résultat du 11 juillet permet au parti pro-présidentiel de former seul un gouvernement, mais aussi d’adopter des lois organiques et ordinaires, c’est-à-dire toutes les lois importantes et nécessaires pour construire un État de droit. Pour les lois constitutionnelles, le PAS aura besoin de 4 votes de l’opposition pour les faire passer. La situation configurée permet donc au parti pro-européen de gouverner le pays pour les 4 ans à venir. La tâche sera loin d’être facile, étant donnée la multitude de problèmes auxquels est confronté le petit pays de la frontière orientale de l’Union européenne. Difficulté supplémentaire, l’équipe insuffisamment expérimentée pour faire face à tous les enjeux. Consciente du poids mis par les Moldaves sur ses épaules, la formation a lancé un appel aux « professionnels qui veulent nous rejoindre dans la gouvernance », en annonçant les priorités immédiates. Il s’agit principalement de :

1. Réformer le système judiciaire afin que les juges aient la possibilité de confisquer des richesses injustifiées et de récupérer le milliard volé du système bancaire ;
2. Attirer des investissements et des fonds européens ;
3. Augmenter la pension minimale jusqu’à 2 000 lei (100 euros) ;
4. Réduire les dépenses des institutions publiques.

L’espoir des Moldaves est énorme, après 30 ans de tâtonnements et de jeu pas toujours très démocratique. Après le chaos des années 90, dominées par d’anciens nomenclaturistes soviétiques transformés du jour au lendemain en démocrates, le choc de l’année 2001, quand la déception en « la démocratie » a fait revenir massivement les communistes au pouvoir, « l’histoire de succès » de la fin des années 2000, compromise par les politiciens corrompus et le vol d’un milliard de dollars du système bancaire national, et le règne du pouvoir oligarchique jusqu’en 2019, la Moldavie respire, après ce 11 juillet 2021, un air qui prévoit de vrais changements, en bien. La validation du scrutin par la Cour Constitutionnelle, prévue pour la fin du mois, offrira les rames pour mener le bateau dans le sens de la normalité. Il ne faut pas oublier, en même temps, que l’opposition, formée par 10 communistes, 22 socialistes et 6 représentants et représentantes du parti « Șor  », sera vigilante. Ces député(e) s-là sont l’émanation d’un électorat qui doit être écouté et respecté, s’agissant, principalement, des citoyens et citoyennes de l’autonomie Gagaouze, une minorité turcophone de religion orthodoxe ; de la région transnistrienne à l’Est et de certains rayons (départements) du nord de la Moldavie. Les réformes doivent concerner tous et toutes, y compris la diaspora, qui a voté massivement avec PAS (86,23 %), mais qui est loin de faire les valises pour retourner en Moldavie.

Les élections législatives anticipées en République de Moldavie, pays qui a la même taille que la Belgique, mais une population 3 fois moins nombreuse, ont été déclenchées par la Présidente Maia Sandu le 28 avril 2021, après l’échec des tentatives légales de nommer un gouvernement. L’exercice démocratique des Moldaves a été suivi par plusieurs observateurs nationaux et internationaux, dont le Réseau européen des organisations d’observation des élections (ENEMO), l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE), le Conseil de l’Europe (CoE), l’Union européenne (UE) ou l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF).
Cette dernière estime que les élections «  se sont déroulées de manière libre, fiable et transparente, et conformément au cadre juridique en vigueur », et même si la mission a listé quelques constats moins positifs (« très peu de partis politiques et d’acteurs des médias ont signé le code de conduite pour la campagne électorale présenté par la Commission électorale centrale » ; « plusieurs cas de discours de haine tenus en public et sur les réseaux sociaux ont été rapportés, ainsi que des allégations de financement illégal d’activités de campagne électorale, de pratiques d’achats de vote et d’utilisation de ressources publiques à des fins de campagne, qui seraient insuffisamment poursuivis et sanctionnés par les autorités en charge  » etc.), ceux-ci ne sont pas en mesure d’influencer le résultat final du scrutin. De même, l’OIF, comme d’autres organisations internationales présentes avec une mission d’observation des élections, a recommandé aux autorités moldaves « qu’une évaluation du cadre électoral soit menée à l’issue des élections, en impliquant l’ensemble des acteurs politiques et de la société civile, afin d’harmoniser et de consolider le cadre juridique électoral, de renforcer la confiance dans l’indépendance des institutions électorales et dans la transparence et l’équité des campagnes électorales, de garantir une information de qualité et une couverture médiatique équitable, et d’assurer le droit des citoyens de choisir librement leurs représentants ».

Donc, après l’euphorie de la victoire, les félicitations (plusieurs présidents de pays et hauts fonctionnaires au niveau international ont déjà salué le choix des Moldaves)... et le champagne, sera venu le temps de l’Action en Solidarité avec les promesses, les espoirs et les attentes des femmes (qui ont été plus nombreuses à voter !), des hommes, des enfants, de tout citoyen et de toute citoyenne de la Moldavie, indépendamment de l’ethnie, la langue parlée, la résidence ou les préférences politiques. Bonne route !

* date de naissance sur la carte de l’Europe le 27 août 1991

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