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Voix du peuple arménien

Voix du peuple arménien

Témoignage
19 septembre 2023 - par Ashkhen Nazinyan 
 - © Arnaud Galy - Agora francophone
© Arnaud Galy - Agora francophone
Ashkhen Nazinyan

Actuellement, les Arméniens suivent avec angoisse les dernières nouvelles du jour. Aujourd’hui l’Azerbaïdjan a lancé une offensive militaire à grande échelle contre l’Artsakh, mettant en danger la vie du peuple arménien. Nous sommes préoccupés par la situation à la frontière. Nous sommes attristés d’apprendre régulièrement la mort d’un garde-frontière âgé de 18 à 20 ans. Les nouvelles officielles parlent de l’accumulation des troupes de l’armée azerbaïdjanaise à la frontière de l’Arménie, de la rhétorique menaçante du pays voisin. Dans ce contexte, les exhortations pacifiques des personnalités officielles de notre pays ne génèrent pour autant pas de sentiment de sécurité parmi le peuple.

Malgré le fort esprit et la volonté patriotiques, après trois ans de conflit, la blessure sanglante de la nation arménienne ne cicatrise pas. En même temps, les slogans belliqueux, expansionnistes et implacables de l’Azerbaïdjan nous obligent à entrer dans une nouvelle lutte. Ils posent des conditions préalables menaçantes, mettent en avant de nouvelles pressions. L’ Azerbaïdjan nous oblige à lutter à nouveau pour notre existence, pour inexistence de nos enfants, de notre patrie, au nom de nos frères et de nos sœurs.

Nos compatriotes de l’Artsakh à quelques kilomètres de nous, en plus d’une pression psychologique indescriptible, meurent de faim depuis des mois. Il semble inconcevable que dans ce monde civilisé, 120 000 personnes soient privées d’approvisionnement alimentaire de base. Les femmes enceintes font des fausses couches en raison de carences nutritionnelles, les patient(e)s sont privées des médicaments et des soins médicaux nécessaires et les enfants fréquentent les écoles en étant sous-alimentés. Cela vous semble-t-il être une situation acceptable au 21ème siècle ?

L’Artsakh appelle à être sauvée et à se sauver elle-même. Les rideaux de fer du passé n’existent plus. Les réseaux sociaux rendent accessibles et audibles les appels au secours des gens. Mais les oreilles restent insensibles et les appels inefficaces.120 000 Arméniens restent constamment assiégés depuis des mois, dans les chaînes de l’ennemi et dans l’épreuve de survie. Savez-vous qu’il existe aussi des types indirects de génocide, quand les gens ne sont pas tués ouvertement, quand une mort lente s’impose à toute une nation ? L’impuissance des Arméniens en Arménie et parmi la diaspora semble tomber dans l’indifférence.

Pourtant, nous continuons de faire confiance au jugement du monde civilisé. Nous faisons confiance à une justice où le pétrole et le gaz n’auront pas plus de valeur que la vie humaine, où un discours diplomatique froid cédera la place à un langage humain et humanitaire. On espère que le présent et l’avenir seront le temps de la justice humaine et pas d’espoirs trompeurs, d’impunité et des mots de soutien qui réchauffent mais ne sauvent pas de mort Peut-être avons-nous encore tort, comme en 1915 lors du génocide arménien. Mais quelle est l’alternative du peuple arménien : une nouvelle guerre, de nouvelles victimes et de nouvelles pertes ? N’en a-t-on pas assez eues ? Pendant des siècles nous avons protégé chaque mètre carré de terre de notre patrie avec notre propre sang et avons tenté de la préserver avec notre propre sueur. C’est pourquoi il existe dans nos cœurs un espoir ou un désir secret que cette fois-ci, le monde civil ne pardonnera pas le comportement agressif et la politique d’occupation insatiable de l’Azerbaïdjan. La situation géographique de l’Arménie ne nous permet pas de vivre sans portes. Et l’Artsakh était et reste notre porte. Ce territoire ne doit pas devenir un gâteau à partager entre superpuissances du monde. Les Arméniens qui y vivent, et cultivent leur terre ont le même droit de vivre en paix et en sécurité que chacun de nous dans ce monde. Notre exigence est juste, notre objectif est honnête.

Oui, les temps difficiles créent des gens forts. Et nous continuons à donner naissance, à naître et à renaître pour un avenir libre, indépendant et heureux. Et nous sommes sûrs que les Charles Aznavour chanteront encore, que les Misak Manushyan lutteront toujours, que les Garzu et Archil Gorki peindront encore, que les nouveaux Komitas joueront toujours dans leur patrie à l’Arménie. Car la terre arménienne enfante des miracles.

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