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Marie-Frédérique Lemieux-Simard : La vulgarisation, un défi contemporain pour la science
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Marie-Frédérique Lemieux-Simard : La vulgarisation, un défi contemporain pour la science

Nicolas Martin, producteur et animateur de l’émission radio La Méthode scientifique sur la chaîne France Culture - © Jonathan Nkubito Nindora
Nicolas Martin, producteur et animateur de l’émission radio La Méthode scientifique sur la chaîne France Culture
© Jonathan Nkubito Nindora

La science veut se démocratiser. Elle veut sortir de sa tour d’ivoire, descendre dans les rues et montrer ce qu’elle a dans le ventre. Pour paraphraser Lyne Sauvageau, directrice de l’ACFAS, la science se doit d’être accessible à tous, au meilleur de sa capacité parce qu’elle en a la responsabilité. La science souhaite être entendue et sollicitée. Il s’agit d’un défi contemporain que nous devons relever, surtout en considérant l’information qui nous provient de toutes parts, tous médias confondus. De différentes façons, nous devons arriver à rendre la science plus digestible. Pour mieux comprendre comment cette vulgarisation peut s’actualiser, j’ai assisté à la finale nationale de l’évènement « Ma thèse en 180 secondes », un défi que relèvent des doctorant.e.s francophones depuis 2012. J’ai pu également recueillir quelques propos de Nicolas Martin, producteur et animateur de l’émission radio La Méthode scientifique sur la chaîne France Culture, qui traite de différents sujets scientifiques simplifiés, sous forme d’une baladodiffusion pour grand public.

« Ma thèse en 180 secondes », résumée en 180 mots

Le thème de la 87e édition de l’ACFAS s’intitule « Engager le dialogue, savoirs et société ». L’évènement auquel j’ai assisté le 29 mai dernier n’aurait pu être mieux adapté. « MT180 », pour les intimes, amène les doctorant.e.s à synthétiser leur thèse en moins de trois minutes et pas une seconde de plus. Il s’agit d’un concours pour les établissements d’études supérieures à travers la Francophonie. Les lauréat.e.s locaux de chaque pays participant se retrouvent dans des finales nationales, et celle à laquelle j’ai eu la chance d’assister était pour le Canada. Parmi les 17 présentations de thèse de 3 minutes, une seule personne est choisie pour participer à la finale internationale qui, cette année, se tient à Dakar au Sénégal. En prime, ce même gagnant remporte une bourse de 1500 $.

La gagnante pour l’édition 2019 est Elodie Nguena de l’Université de Sherbrooke, pour sa thèse « Fragilisation par gallium liquide des brasures à base d’étain pour la reprise de puces microélectroniques à interconnexions à pas fins ».

Le fait est que, voyez-vous, vulgariser un sujet de thèse de doctorat que ce soit en médecine, en chimie ou en psychologie n’est pas chose évidente. Selon les critères du concours, les doctorant.e.s doivent user de leur humour, de mots simples et de comparaisons faciles afin que le grand public saisisse ce que comportent les enjeux de leurs recherches. Par exemple, il peut parfois s’agir de comparer son colocataire Jimmy qui mange tous les restes du frigo avec un champignon parasite -dont prononcer le nom requiert un cours de latin- qui infeste les arbres peupliers du Québec (thèse de Claire Letanneur, UQTR).
MT180 représente un réel défi pour le chercheur et du coup, un exercice de synthèse pertinent pour arriver à rejoindre un public n’étant pas forcément issu du monde des sciences ou des études supérieures.

Zakaria Mestari, Université du Québec à Montréal, remporte le 3e prix de l’édition 2019.

Vulgariser la science, concrètement

Les baladodiffusions sont de plus en plus populaires au sein de chaînes audio. Différentes productions permettent de suivre des récits, écouter des entrevues sur plusieurs thèmes, dont ceux issus des sciences. La Méthode scientifique fait partie des trois émissions les plus téléchargées de la chaîne France Culture et gagne en popularité depuis trois ans, selon Nicolas Martin, producteur et animateur de cette émission. Il avance ne pas être un scientifique de formation, mais plutôt un homme curieux qui a une soif d’apprendre et de comprendre.
Parmi les thèmes de grande écoute de La Méthode scientifique, on retrouve la science-fiction, la santé et l’astrophysique. Selon Nicolas Martin, ce n’est pas seulement un secteur niche ; le public a une réelle attente envers la science. « Un aspect qui est important à la vulgarisation, c’est de parier sur l’intelligence collective. Ce n’est pas parce que ça devient complexe que c’est inintéressant ou que les gens vont s’enfuir. Au contraire, les gens sont curieux. Ils aiment bien chercher à comprendre » explique M. Martin.
Par la baladodiffusion de leur émission et une utilisation constante et stratégique des réseaux sociaux comme Twitter et Facebook, l’équipe de La Méthode scientifique arrive à assurer et mesurer un certain succès dans cette direction. Les médias sociaux ne servent pas seulement de chambres d’écho (1) à l’émission : ils permettent aussi d’y déposer les liens vers les études, les rapports et les sources qui appuient les sujets dont leurs émissions traitent. Cela permet ainsi d’offrir un média global pour l’auditeur ou l’auditrice qui souhaite aller plus loin dans sa compréhension sur le sujet en question.
Par ailleurs, les titres et autres éléments de nature apocalyptique sont des angles à éviter pour M. Martin : « On a toujours fui comme la peste les traits de facilité, l’épaisseur ou les cris d’angoisse. On essaie d’aller à l’encontre de ce mouvement-là. Les gens peuvent faire usage de leur esprit critique et de leur faculté de réflexion. C’est d’ailleurs la marque de France Culture, de ne pas céder à la facilité ou au sensationnalisme » ajoute-t-il.

Pour terminer, la vulgarisation de sujets scientifiques comprend certains défis, mais ils peuvent et se doivent d’être surmontés pour le bénéfice de tou.t.e.s. « Comprendre ce que coûte au monde la course vers le progrès, comprendre les bouleversements planétaires et écologiques qui sont à l’œuvre. C’est pour ça que la science n’est plus tellement un média de niche. Sans avoir ce bagage culturel ou intellectuel, on passerait à côté de la compréhension du monde et des bouleversements qui sont en cours » conclut M. Martin, qui se considère comme un passeur de science, un éveilleur de conscience, apportant ainsi sa contribution au domaine scientifique pour engager ce dialogue entre la science et la société.

(1) Aperçu de la théorie de la chambre d’écho : https://fr.wikipedia.org/wiki/Chambre_d%27écho_%28médias%29

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